La hiérarchie des risques est de nouveau bouleversée. Les marchés financiers suivent souvent plusieurs logiques successivement. Le risque géopolitique revient sur le devant de la scène au bénéfice des marchés de taux, soutenus par ailleurs par une inflation moins forte qu’attendu. Les frappes israéliennes en Iran induisent un risque d’extension des conflits armés au Proche-Orient. L’Iran riposte avec force. Parallèlement, la guerre commerciale n’est pas terminée malgré des avancées supposées. Aux États-Unis, le contexte presque insurrectionnel en Californie appelle aussi à la prudence. Les vieux réflexes de fuite vers la sécurité du T-note sont de nouveau à l’œuvre, de sorte que la problématique budgétaire semble mise entre parenthèses. L’effet amortisseur des taux longs évite une plus forte correction des actifs risqués. L’or est en hausse. Sur le plan conjoncturel, l’inflation américaine surprend une deuxième fois consécutivement à la baisse.
Le consensus des économistes anticipait un effet plus prononcé des tarifs douaniers. L’IPC américain ressort donc stable à 2,4 % en mai et 2,8 % hors énergie et alimentaire. Un certain nombre de catégories de biens (habillement, équipement ménager) soumis aux taxes voient même leurs prix baisser. Les premiers signes de retournement des prix immobiliers favoriseront aussi la désinflation. La Fed, sous pression constante de l’administration, tient une ligne prudente sur l’inflation, qui rappelle la communication du printemps 2024, même si le choc tarifaire constitue un frein à la consommation. Le choc de confiance semble toutefois s’atténuer. La Réserve fédérale devra bientôt tenir davantage compte de la dégradation de l’emploi. Le chômage indemnisé concerne 1,95 million de bénéficiaires, soit le plus haut niveau depuis 2021. Les annonces de plans de licenciement s’accumulent et certains secteurs sont dans l’incapacité de recruter compte tenu de la politique migratoire. Les projections de croissance du FOMC vont probablement être révisées à la baisse, avec un relèvement des anticipations d’inflation et de taux de chômage. Le T-note s’échange autour de 4,40 %, porté par les publications de prix sous les attentes et le réflexe oublié de fuite vers la qualité après l’attaque israélienne en Iran. La tendance à la pentification s’est donc interrompue.
Il est néanmoins probable que les enjeux budgétaires raviveront la pression haussière sur la partie longue dans les prochaines semaines, au travers de la prime de crédit. La provision 899 du budget pourrait impacter la demande étrangère d’actifs américains, dont les Treasuries. Les revenus d’intérêt bénéficient actuellement d’un régime d’exception qui semble en effet remis en cause. Le Bund oscille sans tendance autour de 2,50 %. La BCE conserve un biais accommodant sur sa politique de taux mais le resserrement quantitatif atténue l’impact des baisses du taux de dépôt sur les maturités plus longues. L’inflation anticipée remonte sur le court avec les évolutions du baril. Les emprunts souverains périphériques continuent de surperformer les dettes françaises et belges.
Après la France, la Belgique a été dégradée d’un cran à A+ par Fitch en raison du déficit budgétaire structurel. La pression vendeuse sur l’OLO (57 pb) semblait en effet s’accentuer en fin de semaine. La convergence du BTP italien vers les pays mieux notés mais fragiles continuera. Sur le marché du crédit, les niveaux de valorisation atteints posent question mais le marché primaire rencontre encore une bonne demande des investisseurs. Le spread contre swap (85 pb) témoigne de la résilience du marché comme l’iTraxx Crossover qui termine la semaine sans dépasser les 300 pb. Les actions sont en baisse modeste aux États-Unis mais perdent 2 % en Europe en cinq séances. La volatilité remonte au-dessus de 20 %. L’Asie est relativement épargnée.