mar. Jan 14th, 2025

Depuis 2017, la productivité au sein de la zone euro décline, fragilisant ainsi la croissance économique. Cette situation touche à la fois les services et l’industrie, et contribue au décrochage économique des États européens par rapport aux États-Unis.

 

Depuis le milieu des années 2010, le taux d’emploi progresse dans la zone euro (hors période Covid). De nombreuses personnes peu qualifiées ont trouvé un emploi, principalement dans le secteur des services. Leur taux de chômage a diminué, passant de 22 % en 2013 à 12 % en 2024. Sur la même période, leur taux d’emploi est passé de 29 à 43 % . L’intégration dans le monde du travail de personnes ayant un faible niveau d’éducation s’accompagne, de manière logique, d’une stagnation, voire d’une baisse de la productivité. Par ailleurs, la majorité des emplois créés l’ont été dans les services domestiques (services à la personne, logistique, loisirs), secteurs généralement caractérisés par une faible productivité. Plus surprenant, le recul de la productivité touche également le secteur manufacturier. Alors qu’entre 2010 et 2024, la productivité dans l’industrie a progressé deux fois plus vite que dans les services (+6 % contre +3 %), depuis 2017, elle stagne.

 

Cette stagnation a souvent été attribuée aux difficultés de recrutement rencontrées par les entreprises européennes, qui ont préféré maintenir leurs effectifs même en période de faible demande, par crainte de ne pas disposer d’un nombre suffisant de salariés en cas de reprise. Souvent mis en avant lors de l’épidémie de Covid, cet argument semble toutefois moins pertinent en 2025.

 

Un facteur plus crédible réside dans la faiblesse de l’investissement en nouvelles technologies au sein de la zone euro. Les investissements en TIC, y compris les logiciels, représentaient 3,5 % du PIB aux États-Unis en 2024, contre seulement 2,4 % dans la zone euro. En France, ce ratio n’atteignait que 2 %. Les dépenses de recherche et développement (R&D) aux États-Unis représentaient, toujours en 2024, 2,9 % du PIB, contre seulement 1,5 % dans la zone euro.

 

En raison de la stagnation de leur productivité, les entreprises européennes voient leurs marges bénéficiaires reculer. Cette tendance est d’autant plus marquée que les entreprises doivent faire face à l’augmentation du coût de l’énergie et des salaires. Par ailleurs, l’intensification de la concurrence étrangère, notamment chinoise, a accentué cette pression. Les entreprises sont donc peu incitées à investir en Europe. Il en résulte une baisse de la production industrielle, qui a chuté de 8 % entre 2019 et 2024. La stagnation de la productivité au sein de la zone euro illustre les fragilités structurelles d’une économie en quête de dynamisme. Si l’augmentation du taux d’emploi constitue une avancée sociale indéniable, elle s’est faite au prix d’une moindre efficience économique. Combinés à une concurrence mondiale exacerbée, les défis technologiques mettent en lumière les limites du modèle économique européen. Les entreprises peinent à dégager les marges nécessaires pour investir et innover, tandis que les politiques publiques tardent à combler le fossé avec les États-Unis.

 

Pour éviter un décrochage durable, il est urgent d’engager une politique ambitieuse d’investissement dans les nouvelles technologies et la recherche, tout en favorisant un cadre économique compétitif. La zone euro ne peut se contenter d’un progrès quantitatif en matière d’emploi si celui-ci ne s’accompagne pas d’une montée en gamme qualitative. La compétitivité de demain repose sur les choix d’aujourd’hui. À défaut d’une réaction rapide, l’Europe risque de s’enliser dans un cercle vicieux de stagnation et de perte d’influence sur la scène économique mondiale.

 

Dans quels secteurs investir en Europe en 2025 ?

 

L’année 2024 a été marquée par une forte augmentation des valeurs boursières, sauf en France. En Europe, tous les secteurs d’activité n’ont pas évolué de manière homogène. Les valeurs technologiques en lien avec l’intelligence artificielle ont suscité un réel engouement, tandis que celles de l’industrie automobile ont été délaissées. Après une période faste, le secteur du luxe a accusé un coup de frein en 2024, en raison des difficultés économiques de la Chine. En se plaçant sur une longue période, il est possible de dégager des tendances pour les actions européennes et d’esquisser des projections pour 2025.

 

Parmi les 11 secteurs d’activité traditionnellement suivis par les investisseurs (télécommunications, consommation discrétionnaire, biens de consommation de base, énergie, finance, santé, industries, technologies, matériaux de base, immobilier, services aux collectivités), les indices sectoriels (Eurostoxx) qui ont surperformé depuis 2011 sont les suivants :

 

  • Santé ;
  • Technologies ;
  • Industrie ;
  • Matériaux de base.

 

En revanche, les indices sectoriels suivant ont sous-performé :

 

  • Télécommunications ;
  • Biens de consommation ;
  • Énergie ;
  • Finance ;
  • Services aux collectivités ;
  •  

 

Pour 2025, les valeurs automobiles devraient continuer à souffrir. Les incertitudes économiques et politiques incitent les ménages à la prudence, leur niveau de confiance restant faible. Le taux d’épargne des ménages dans la zone euro dépasse 15 % du revenu disponible brut, contre 12 % avant la crise sanitaire. Il pourrait se stabiliser ou légèrement baisser, mais sans revenir à son niveau de 2019. Parallèlement, la production industrielle de l’automobile au sein de la zone euro a reculé de 20 % entre 2018 et 2024. Une reprise immédiate n’est pas attendue.

 

Le secteur de l’habillement devrait également rester sous pression cette année. Les services publics et les travaux publics, avec les politiques de réduction des déficits en zone euro, devraient enregistrer une contraction. Les entreprises énergétiques pourraient subir une baisse de leurs valeurs en raison de la faiblesse des prix du pétrole et d’une abondance de production électrique. Le bâtiment redémarre lentement, mais l’activité des matériaux reste freinée par la hausse des taux d’intérêt. La construction ainsi été réduite de 5 % depuis 2022. Cependant, la baisse actuelle des taux devrait soutenir une reprise du secteur.

Confrontées à des problèmes de compétitivité vis-à-vis des États-Unis et de la Chine, les entreprises industrielles européennes voient leur production reculer en volume. Les prix des produits industriels baissent, pesant sur les marges bénéficiaires, d’autant que la productivité en zone euro diminue. L’aéronautique et les équipements militaires font figure d’exception grâce au développement du transport aérien et à l’augmentation des budgets de défense.

 

Les secteurs prometteurs pour une appréciation des valeurs boursières incluent :

 

  • Les services de télécommunications, grâce au développement de la téléphonie, des sites Internet et de l’intelligence artificielle ;
  • La finance, soutenue par la remontée des taux d’intérêt à long terme ;  La santé, en lien avec le vieillissement de la population ;  Les technologies de l’information et de la communication.

 

Cependant, la forte valorisation des actions liées à l’intelligence artificielle commence à susciter des interrogations. Le secteur financier offre des perspectives de plus-values car il reste sous-valorisé depuis plusieurs années.

 

Globalement, la perspective pour les indices boursiers européens en 2025 reste défavorable avec la faiblesse de la croissance économique et la remontée des taux d’intérêt à long terme, en particulier aux États-Unis où l’effet inflationniste des politiques de Donald Trump pourrait avoir des incidences au niveau mondial. Les investisseurs doivent donc concentrer leurs portefeuilles sur quelques secteurs stratégiques, notamment les télécommunications, les services financiers, la santé et les technologies. À un niveau plus sectoriel, l’aéronautique et le matériel militaire offrent des opportunités de progression.

 

La trajectoire boursière européenne pour 2025 s’annonce semée d’embûches entre stagnation économique et pressions inflationnistes venues d’outre-Atlantique. Dans cet environnement complexe où les incertitudes géopolitiques et technologiques se conjuguent aux défis climatiques, les investisseurs devront se montrer sélectifs et visionnaires. Si certains secteurs traditionnels, comme l’automobile et l’énergie, peinent à se réinventer, d’autres, portés par les transformations sociétales et numériques, s’imposent comme les moteurs de demain.

 

Les télécommunications, les technologies et la santé incarnent ces nouvelles dynamiques, alimentées par des tendances de long terme comme l’intelligence artificielle et le vieillissement démographique. Toutefois, le mirage d’une survalorisation guette, appelant les investisseurs et  les acteurs économiques à une gestion prudente mais audacieuse. L’Europe doit relever le défi de la compétitivité et de l’innovation pour se repositionner dans la compétition mondiale, faute de quoi ses marchés risquent de se contenter du rôle d’acteurs secondaires sur l’échiquier économique global.

 

L’investisseur avisé devra conjuguer anticipation et discernement : privilégier les secteurs d’avenir tout en évitant les écueils d’un emballement irrationnel. Car, plus que jamais, la volatilité s’impose comme le maître-mot des années à venir.

 

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