ven. Nov 15th, 2024

La croissance est avant tout une question de productivité. Au XVIIIe siècle, les gains de productivité de l’agriculture, liés notamment à un recours plus important aux machines, ont permis de réduire le nombre d’agriculteurs, offrant ainsi à l’industrie naissante la main-d’œuvre dont elle avait besoin. Les gains de productivité constituent un pilier de l’augmentation de la rémunération des travailleurs et de celle des apporteurs de capitaux. L’avance prise par les États européens au cours du XIXe siècle puis par les États-Unis au XXe siècles sur le reste du monde est avant tout la conséquence des différentielles de productivité. Le rattrapage de la Chine à partir de 1978 et surtout à compter des années 90 trouve également sa source dans l’augmentation de la productivité. Depuis une vingtaine d’années, les gains de productivité se font plus rares tant dans les pays développés que dans les pays
émergents.

Seuls les pays qui étaient à la traine en la matière enregistrent des gains importants. Au niveau mondial, trois groupes de pays peuvent être distingués en matière de productivité :

 Le premier regroupe les pays ayant un niveau de productivité élevé (plus de 60 000 dollars de valeur ajoutée par actifs en 2022). Les États-Unis figurent en tête (140 000 dollars par tête annualisée) suivis par le Royaume-Uni (90 000 dollars), la zone euro (80 000 dollars), le Japon (70 000 dollars) et la Corée du Sud (62 000 dollars) ;
 Le deuxième groupe rassemble les pays dont la productivité par tête se situe entre 15 000 et 40 000 dollars. Appartiennent à ce groupe la Chine (37 000 dollars), les pays d’Europe centrale et orientale (35 000 dollars), les pays d’Amérique latine (22 000 dollars) et les pays émergents d’Asie du Sud Est ;
 Le troisième groupe comprend les pays d’Afrique et l’Inde dont la productivité par tête est inférieure à 10 000 dollars.

Le niveau de productivité par tête détermine le PIB par habitant. Celui des États-Unis est de 80 000 dollars en 2022, contre 50 000 pour la zone euro et 32 000 dollars pour le Japon et la Corée du Sud. Le PIB par habitant était, en 2022, de 22 000 dollars dans les pays d’Europe centrale et orientale, de 13 000 dollars en Chine et de 5 000 dollars dans les pays d’Asie du Sud Est. Il ne dépassait pas 2 700 dollars en
Afrique et en Inde.

La productivité et l’effet de rattrapage économique

Lors de ces vingt dernières années, la productivité par tête a augmenté de 20 % en Corée du Sud, de 18 % aux États-Unis et de moins de 5 % en zone euro, au Japon et au Royaume-Uni. En Chine la hausse a été de 70 %. Les pays d’Amérique latine ont connu deux décennies de stagnation de leur productivité par tête. Celle-ci a augmenté de 40 % pour les pays d’Europe centrale et orientale et de 35 % pour les pays d’Asie du Sud Est. Pour l’Inde la hausse atteint 80 % et pour les pays d’Afrique moins de 20 %. Depuis 2021, la croissance de la productivité par tête est nulle ou faible au sein des pays avancés et émergents. En Afrique ou en zone euro, la productivité a tendance à décliner depuis la crise sanitaire.
L’Inde est engagée dans un réel processus de rattrapage en matière de productivité en lien avec l’augmentation du niveau de formation. L’Inde dispose sur ce sujet de marges de progression importantes.

La mise à niveau des infrastructures (réseaux, énergie) devrait également jouer en faveur de l’Inde et des pays africains. La production d’électricité par habitant est de 14 000 mégawatts par habitant aux États-Unis, contre 6 en Chine et moins de 2 en Inde ou Afrique.

États-Unis, Chine, Afrique Inde

Structure de la population âgée de 15 à 64 ans selon le niveau d’éducation atteint (en %, 2015)

Aucune instruction Primaire Secondaire Supérieur

La diminution des gains de productivité

La diminution des gains de productivité est importante depuis une vingtaine d’années. Elle concerne les pays de l’OCDE et de nombreux pays émergents. La productivité n’augmente plus que de 1 % par an voire décline pour certains pays elle. Ce déclin des gains de productivité a plusieurs sources. La tertiarisation des économies les plus avancées conduit à une moindre progression de la productivité. L’industrie génère traditionnellement des gains plus importants que les services. La recherche, les innovations coûtent de plus en plus cher.

La diffusion du progrès technique tend à se ralentir en raison de la complexité des sociétés et du vieillissement des populations.
Ce dernier peut également influer sur la productivité du travail. Les pays qui maintiennent des gains de productivité sont ceux qui enregistrent une croissance de leur population active et en particulier des actifs âgés entre 20 et 49 ans. En 2023, la population de 20 à 49 ans a augmenté de 3 % en Afrique, de 1,1 % en Inde et de 0,8 % aux États-Unis quand elle a baissé de 0,8 % en zone euro, de 1,5 % et de 2 % au Japon.
Une augmentation des gains de productivité passe essentiellement par une progression du niveau des compétences de la population active et de l’investissement.
La baisse du niveau scolaire mesuré par l’OCDE dans son étude PIAAC de 2022 constitue un sujet d’inquiétude majeur en ce qui concerne l’évolution de la productivité dans les pays avancés.

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