sam. Juil 12th, 2025

Par Michaël Nizard, Head of Multi-Asset & Overlay d’Edmond de Rothschild Asset Management

L’administration Trump a relancé la bataille tarifaire, annonçant une nouvelle salve de hausses de droits de douane contre plusieurs partenaires commerciaux, dont le Japon, la Corée du Sud, l’Indonésie et la Malaisie. Les taux, souvent fixés à 25 % ou plus, pourraient s’appliquer dès le 1er août, bien que la date, à l’image de nombreuses annonces présidentielles, demeure “non ferme”, selon les mots de Donald Trump lui-même.
Mais le principe est clair : les pays qui refusent de s’aligner sur les priorités économiques américaines s’exposent à des droits de douane punitifs. La logique s’étend même aux biens “transshippés”, c’est-à-dire réexportés via des pays tiers pour contourner les taxes. L’initiative prendrait même une tournure politique : les États alignés avec les politiques des BRICS pourraient se voir infliger 10 % supplémentaires. Une allusion directe au récent sommet à Rio, où plusieurs pays ont dénoncé l’unilatéralisme américain.
Le climat d’incertitude est renforcé par le flou autour des négociations. Si des discussions sont engagées avec l’Union européenne, les concessions semblent fragiles : un tarif plancher de 10 % reste de mise, malgré les espoirs d’un accord.
Les marchés asiatiques et européens semblent provisoirement rassurés, misant sur la porosité des positions américaines et la poursuite d’intenses négociations, ceci pouvant d’ailleurs expliquer la très bonne tenue du Kospi, du Nikkei ou même de l’eurostoxx.
Deux explications peuvent justifier la faible réaction des marchés à ce stade. Primo, sur la base des informations disponibles, comme certains secteurs d’ores et déjà été touchés (autos, pharma…) par le relèvement des taxes douanières, les nouveaux taux viseraient les biens qui n’ont pas encore été touchés, donc avec un effet marginal sur le taux effectif. Le taux moyen ne monterait que de 15,5 % à 16,6 %.
Deuxio, le marché est convaincu que tout reste renégociable, comme avec le UK (accord non contraignant) ou le Vietnam.
Les marchés américains, eux, stabilisent sur leur niveau record en accusant de légères pertes à ce stade, le S&P 500 ayant perdu seulement 0,79 % hier tandis que les petites valeurs américaines, plus sensibles aux coûts d’importation, chutent davantage (–1,55 % pour le Russell 2000). Dans le même temps, les taux d’intérêt long terme repartent à la hausse, corrigeant  quelque peu les anticipations de baisse de taux pour la Fed. Le scénario d’une baisse des taux en septembre devient moins probable, à mesure que l’administration multiplie les pressions sur Jerome Powell.
Derrière cette agitation tarifaire se joue un jeu d’influence manifeste : l’administration veut démontrer sa fermeté commerciale sans déclencher de panique boursière. Mais à mesure que les annonces s’accumulent et que les délais s’étirent, le risque se déplace : celui d’un retournement brutal si, un jour, ces menaces sont réellement mises en œuvre, d’autant que les premiers effets des hausse tarifaires n’ont pas encore eu le temps de s’imprégner dans l’économie réelle.
Pour cet été, nous maintenons nos allocations légèrement sous-pondérées en actions, principalement sur les États-Unis, jugeant les valorisations élevées malgré des résultats qui devraient ressortir moins dégradés qu’anticipés par le consensus. Nous restons également vigilants sur la duration, avec une préférence pour les obligations d’entreprises par rapport aux obligations gouvernementales. Nous scruterons de près l’évolution des anticipations d’inflations, l’évolution du pétrole, et surtout la volatilité des actions américaines qui nous semble trop basse, eu égard aux facteurs de risque sur l’activité mondiale.

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