Paris, le 29 janvier 2025 – Les récents propos du président du groupe Michelin ont été abondamment commentés. Ils ne font que rappeler une réalité que connaissent bien les entreprises qui « travaillent et produisent en France » : le travail y coûte plus cher qu’ailleurs, il y paie moins qu’ailleurs. Loin de s’attaquer à cette anomalie qui place tant les employeurs que les employés français dans une situation quasi intenable, le projet de budget pour 2025 menace de l’aggraver. Et d’empêcher les ETI de continuer à jouer leur rôle moteur pour l’emploi dans les régions, les villes moyennes et les zones rurales.
Baisse des allègements de cotisations sociales (ciblée sur les emplois qualifiés, loin de l’ambition d’une économie des bons salaires), diminution du soutien à l’apprentissage (en dépit de son indéniable retour sur investissement), hausse du versement mobilité (un impôt de production, à rebours de la trajectoire de baisse initiée en 2021), réduction de l’indemnisation des arrêts maladie (dont les entreprises sont les premières à subir la multiplication) : si ces arbitrages étaient confirmés, en 2025 le travail coûterait encore plus cher et paierait encore moins. En parfaite contradiction avec le bon sens économique, les exigences de la situation sociale, la férocité de la compétition internationale.
Les ETI n’ignorent pas les puissantes contraintes budgétaires du pays qui affectent nos perspectives de croissance et de prospérité. Mais les ETI savent compter : moins de créations d’emplois – et même des destructions, notamment sous l’effet de la vague de faillites et de défaillances qui les touche –, moins de recrutements d’apprentis et d’embauches durables à l’issue de leur apprentissage… tout ceci se traduirait immanquablement par des hausses de dépenses sociales, des pertes de recettes fiscales et sociales. A rebours des économies escomptées pour nos finances publiques. Et avec un effet domino sur l’employabilité des jeunes et moins jeunes.
Cette logique implacable semble pourtant échapper à la décision politique tétanisée par le court termisme. C’est d’autant plus dommageable que les nuages noirs qui s’accumulent en ce début d’année au-dessus de l’Hexagone exigeraient une vision de long terme qui replace l’activité au centre de notre projet de société. En effet, les chiffres de notre récente enquête de conjoncture1, dévoilés ici
en exclusivité, font état d’une dégradation sans appel de la situation des ETI : – 1 ETI sur 2 a connu une baisse de son chiffre d’affaires en 2024 par rapport à 2023 et 1 ETI sur 2 également a vu sa rentabilité se dégrader sur un an ;
– Les projections ne sont pas meilleures : seuls 16% des dirigeants font état d’un carnet de commandes plus rempli qu’il y a un an et près de 55% sont inquiets pour les perspectives de leur entreprise au premier trimestre de l’année ;
1 Baromètre Palatine-METI du financement des ETI #15 – janvier 2025
– Le contexte politique et budgétaire française pèse lourd : 1 ETI sur 5 a ainsi suspendu, en tout ou partie, ses investissements en France, 3 sur 10 ont réduit l’enveloppe allouée, 11% les ont réorientés vers d’autres pays.
Alors que le chômage est en nette hausse, le front de l’emploi préoccupe particulièrement : – 1 ETI sur 3 indique avoir réduit les recrutements envisagés en France en 2025 (et/ou l’enveloppe allouée), 1 sur 4 les avoir suspendus ou se limiter au remplacement des postes existants ; – Les jeunes risquent d’être les premières victimes de ce coup de frein contraint : face à la baisse annoncée du soutien à l’apprentissage, près d’1 ETI sur 2 a déjà réduit ou va devoir réduire son nombre d’apprentis. Cette réduction s’élèverait à 35% en moyenne.
Dans un pays où le coût du travail constitue une anomalie et affecte sévèrement le pouvoir d’achat des salariés comme la compétitivité des entreprises et leur capacité à monter en gamme, augmenter le coût du travail ne ferait que des perdants : des jeunes moins formés et à l’employabilité diminuée, des créations de postes en moins et des destructions de postes en plus, une politique de rémunération moins ambitieuse, une dynamique d’innovation et de transformation moins soutenue, des projets d’investissements réduits, annulés ou réorientés vers d’autres pays, et in fine un redressement des finances publiques rendu impossible par une activité en berne et un tissu productif rétréci. Ne pas faire le choix de l’activité serait renoncer à la prospérité.
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À propos des ETI en France
6800 ETI
1 000 milliards d’euros de chiffre d’affaires
25 % de l’emploi en France
38% de l’emploi industriel en France
1/3 des exportations françaises
2/3 des sièges sociaux des ETI situés hors de l’Ile-de-France
À propos du METI
Fédérant la communauté des ETI à l’échelle nationale et à travers le réseau des Clubs ETI régionaux, le METI poursuit une ambition : placer les ETI, entreprises de Iong terme garantes de la prospérité des régions, au cœur de la stratégie économique de la France et de l’Union européenne. Son action se structure suivant quatre axes principaux :
1- Documenter et mettre en lumière la contribution majeure des ETI au développement économique et social de leurs territoires d’implantation (base industrielle, emplois, exportations, investissements, transformations, responsabilité sociétale, etc.)
2- Plaider pour la restauration des conditions du « travailler, produire et s’engager » en France, en valorisant l’investissement de long terme et en s’attaquant au différentiel de compétitivité du site France
3- Promouvoir les dynamiques de transformation et d’engagement des ETI, sur les plans environnemental, numérique et sociétal
4- Appeler à la création d’une catégorie ETI européenne et à la prise en compte des enjeux des ETI par les institutions européennes
www.m-eti.fr