Analyse de Philippe Crevel, Directeur du Cercle de l’Épargne
La France a enregistré une croissance au deuxième trimestre en ligne avec celle des trimestres précédents. Celle-ci a été portée par le commerce extérieur et l’investissement quand la consommation des ménages est restée atone. Le résultat du deuxième trimestre rend possible une croissance de 1 % en 2024 ce qui correspond aux prévisions du gouvernement. L’après Jeux Olympiques pourrait générer un effet dépressif qui pourrait être compensé, à l’automne, par la reprise de l’activité rendu possible par la baisse des taux d’intérêt. Logiquement, les ménages devraient, avec la désinflation, renouer avec la consommation au cours du second semestre. En l’état, les conséquences économiques de la crise politique actuelle en France sont difficiles à apprécier.
Un taux de croissance de 0,3 % au deuxième trimestre 2024 Le produit intérieur brut (PIB) en volume a augmenté, selon l’INSEE, de +0,4 % au deuxième trimestre, après +0,3 % au trimestre précédent et +0,4 % au dernier trimestre 2023. L’INSEE a procédé à une révision à la hausse de la croissance de ces deux derniers trimestres. La demande intérieure finale (hors stocks) repart légèrement à la hausse et contribue positivement à la croissance du PIB ce trimestre (+0,1 point après 0,0 point au premier trimestre 2024), du fait du léger rebond de la formation brute de capital fixe (FBCF, +0,1 % après -0,4 %). La consommation des ménages est stable ce trimestre (0,0 % après -0,1 %). La contribution du commerce extérieur à la croissance est également positive au deuxième trimestre 2024 (+0,2 point après +0,3 point). En effet, les importations sont stables (0,0 % après -0,3 %), et les exportations sont toujours dynamiques (+0,6 % après +0,7 %). Enfin, la contribution des variations de stocks à l’évolution du PIB est de nouveau nulle ce trimestre (0,0 point après 0,0 point au premier trimestre 2024). Une production en forte hausse grâce aux services marchands La production totale a progressé au deuxième trimestre 2024 de +0,5 % après -0,1 %. Ce bon résultat est imputable aux services. En effet, la production de l’industrie manufacturière a diminué de 0,4 % au deuxième trimestre dans le prolongement de la baisse de 0,7 % du trimestre précédent. Elle a baissé dans le secteur du matériel des transports et dans l’agro-alimentaire. La production continue de se contracter dans la construction, -0,7 % après -1,1 %) et pour le quatrième trimestre consécutif. La production agricole diminue également. Celle de l’industrie manufacturière est de nouveau en baisse (-0,4 % après -0,7 %). La production de services marchands a connu au deuxième trimestre une hausse de +0,8 % après +0,7 %. La hausse de la production dans les services aux entreprises demeure forte (+1,2 % après +0,8 %). Le secteur de l’hébergement et de la restauration a également enregistré une croissance élevée (+0,7 % après +0,1 %). Le secteur de l’information et communication, grâce à la digitalisation et à l’intelligence artificielle, a enregistré une croissance importante (+1,4 % après +1,6 %) La consommation toujours en panne Les ménages, malgré la baisse de l’inflation, n’ont pas repris le chemin des magasins réels ou virtuels. La préférence reste donnée à l’épargne. Ils demeurent méfiants sur l’évolution de la conjoncture. Le contexte politique pourrait influer sur leurs comportements au cours du second semestre. La consommation des ménages est ainsi restée stable au deuxième trimestre (0,0 % après -0,1 %). La consommation alimentaire a une nouvelle fois diminué (-1,6 % après -0,1 %). La consommation en carburants est également en retrait (-1,0 % après +1,8 %). En revanche, la consommation en gaz et électricité accélère (+3,5 % après +0,3 %), due à un printemps plus frais que les années précédentes, et la consommation en matériel de transports, notamment en automobiles, est en hausse (+1,6 % après -3,5 %). Si la consommation des ménages en biens est en recul, celle en services continue de progresser. Elle a augmenté de 0,5 % au deuxième trimestre, contre +0,3 % au premier. Elle est portée par l’accélération de la consommation en services de transport (+1,8 % après +0,6 %). Le tourisme est également une source de dépenses pour les ménages, +0,8 % pour les services d’hébergement et restauration après +0,1 % au trimestre précédent. Reprise de l’investissement au deuxième trimestre La Formation Brute de Capital Fixe (FCBF) est en hausse au deuxième trimestre de +0,1 % contre un recul de 0,4 % au précédent. La FCBF en services marchands a été vive (+1,7 % après +0,5 %), quand la FBCF en produits manufacturés continue de baisser (-1,0 % après -0,6 %). L’accélération de l’investissement en services marchands est liée au dynamisme de l’investissement en information communication (+2,3 %) et à celui de l’investissement en services juridiques, scientifiques, techniques, administratifs et de soutien (+1,2 %). L’investissement en construction continue de baisser (-0,6 % après -0,9 %). Le commerce extérieur moteur de la croissance La contribution du commerce extérieur à la croissance du PIB est positive au deuxième trimestre 2024 de 0,2 point, après +0,3 point au trimestre précédent. Ce bon résultat est dû à la progression des exportations de 0,6 % (+0,7 % au trimestre précédent), une nouvelle fois portées par les ventes de matériels de transports (+1,8 % après +1,5 %). La France a, en effet, livré durant cette période, un nouveau navire et de nombreux avions. De leur côté, les importations sont restées stables (+0,0 % après -0,3 %). Variations de stocks nulles au deuxième trimestre Les variations de stocks ne contribuent pas à la croissance du PIB ce trimestre : 0,0 point, comme au premier trimestre 2024. Un second semestre incertain La croissance du premier semestre aura été plus élevée que prévu. Elle s’accompagne d’une stabilisation du chômage. Les deux points noirs sont l’atonie de la consommation et le recul de la construction. La baisse de l’inflation et la diminution des taux d’intérêt pourraient faciliter la reprise de l’une et de l’autre. Pour autant, l’économie française devra faire face, dans les prochains mois, à un petit effet dépressif post Jeux. La préparation et le tenue des compétitions sont des sources d’activités (réalisation d’infrastructures, équipements, services, dépenses des touristes étrangers, etc.). Ce surcroît de dépenses disparaîtra à partir de septembre. Le PIB du troisième trimestre pourrait, de ce fait, enregistrer une croissance plus faible. Le contexte politique en France pourrait peser sur l’activité en raison de l’attentisme possible des investisseurs et des consommateurs. L’élection, du mois de novembre aux États-Unis est susceptible d’avoir des effets négatifs sur la conjoncture mondiale. Enfin l’évolution la croissance dépendra de la situation de l’économie chinoise, en proie à un ralentissement depuis plusieurs mois. |