Après plusieurs trimestres de forte hausse, l’emploi salarié est resté stable au quatrième trimestre 2022. Depuis la crise
sanitaire, la hausse du nombre d’emplois s’est accompagnée parallèlement d’une baisse de la productivité du travail qui
ne devrait être que momentanée.
La stabilité de l’emploi n’est pas surprenante dans un contexte conjoncturel morose. La légère hausse de l’emploi
intérimaire est plutôt encourageante pour 2023.
Après avoir progressé de près de 100 000 emplois au cours des trois premiers trimestres de l’année 2022, l’emploi
salarié privé a stagné au quatrième trimestre (seulement 3 000 créations nettes d’emplois). Cette tendance était
attendue au vu du fort ralentissement de l’activité, avec une croissance limitée à 0,1 % au quatrième trimestre.
L’industrie a gagné 3 000 emplois au cours du trimestre écoulé, permettant de dépasser nettement le nombre
d’emplois industriels de fin 2019.
La hausse de l’emploi intérimaire au quatrième trimestre (+ 6 500 emplois) est plutôt un signal encourageant. En
effet, l’intérim sert généralement de « variable d’ajustement » de l’emploi dans les entreprises. Une hausse de l’emploi
intérimaire indique donc que les besoins en main d’œuvre se maintiennent, ce qui pourrait déboucher sur des créations
d’emplois pérennes dans les trimestres à venir.
Sylvain BERSINGER
économiste
Le fort rebond de l’emploi au sortir de la crise sanitaire, plus rapide que la hausse du PIB, implique une baisse de la
productivité du travail. Cette évolution pourrait s’expliquer par les perturbations induite par la crise sanitaire ou la hausse
du nombre d’apprentis, et ne traduit pas nécessairement une tendance durable.
À long terme, le pouvoir d’achat de la population évolue de façon parallèle à l’évolution de la productivité dans la
mesure où le partage de la valeur ajoutée reste inchangé (ce qui est globalement le cas en France). Le fait que l’emploi
ait progressé plus rapidement que le PIB ces dernières années implique une baisse de la productivité de chaque emploi,
qui a décliné d’environ 3 % en 4 ans. Cette tendance, si elle s’avérait durable, serait un frein puissant à la progression
du pouvoir d’achat des salariés.
La baisse de la productivité par salarié peut s’expliquer par les perturbations générées par la crise sanitaire et par la
composition de l’emploi. Certains secteurs comme l’aéronautique ou l’automobile ont vu leur activité perturbée mais
n’ont pas diminué leur nombre de salariés en anticipation d’un rebond d’activité à venir. En conséquence, la
productivité mesurée par salarié a baissé dans ces secteurs. Les changements de postes des salariés (hausse d’environ
20 % des démissions entre 2019 et 2022)
1 ont pénalisé la productivité de façon momentanée (avec des salariés qui
deviennent en moyenne moins expérimentés), mais la tendance n’est pas mécaniquement durable. La hausse sensible
des contrats d’apprentissage (qui représentait environ un tiers des créations d’emploi) peut également entraîner une
baisse du niveau d’expérience et donc de la productivité moyenne de l’ensemble des travailleurs, une tendance
passagère qui se résorbera à mesure que les apprentis gagneront en savoir-faire.