Par Coach Omnium
La notion d’hôtellerie a toujours plus ou moins existé, mais de manière plutôt sommaire, proposant un
hébergement (souvent collectif), à boire et à manger, notamment pour les marchands ou les pèlerins. Jusqu’à l’Antiquité, l’hospitalité était généralement, de coutume, un acte gratuit.
Cela commence à se transformer entre les 17e et 18e siècle, notamment avec l’amélioration des voies carrossables et l’apparition de la diligence. Une
évolution du tourisme et de l’hôtellerie (que l’on n’appelait pas ainsi) qui va se poursuivre avec le développement du Grand Tour, voyage de la jeune aristocratie anglaise à travers l’Europe, puis avec l’essor de l’industrialisation à travers l’Europe au cours du 19e siècle.
On voit alors apparaître les premiers hôtels, principalement dans les milieux urbains, puis sur les littoraux et en altitude avec la naissance des stations balnéaires et de montagnes.
Il existait auparavant principalement des auberges et des relais de poste où l’on prenait ses repas en commun avec l’aubergiste et sa famille, le souper se résumant souvent à un plat unique et où le partage d’une chambre avec d’autres voyageurs était habituel. Ces nouveaux hôtels, innovants pour l’époque, vont venir bouleverser le voyage.
C’est à New York, en 1794, que le City Hotel est le premier à proposer des logements privés, une salle de bal et de banquets. Depuis, l’hôtellerie n’a cessé d’évoluer, d’innover, de chercher à étonner. C’est encore le cas à notre époque : nouveaux concepts, chaînes hôtelières, modélisations, innovations technologiques, etc.
On pourrait penser que l’innovation d’aujourd’hui revêtirait un caractère différent de celle du passé. Elle est, en réalité, propre au contexte de développement de notre société de consommation, parmi lesquelles : la concurrence accrue, le besoin prégnant d’un retour aux notions d’échange, de partage, de confort, de
personnalisation dans un environnement mondialisé, l’impact des technologies numériques, la prise de conscience écologique… L’hôtellerie n’est pas étrangère à l’évolution de l’habitat, de l’automobile et de l’immobilier de bureaux.
Les hôteliers sont de facto obligés d’être attentifs à toutes ces évolutions pour offrir aussi bien les basiques actuels attendus par chaque client, que pour suivre, voire anticiper, les mutations et innovations du secteur.
L’innovation se définit comme un produit ou une prestation de service perçus comme nouveau par le marché. Qu’il s’agisse de nouveaux produits, de procédés, de commercialisation ou d’organisation (selon les 4 classements définis par l’OCDE), l’idée est bien d’apporter de la nouveauté et de l’inédit à un secteur, qui peut finir par lasser ses utilisateurs. Car l’on voyage de plus en plus et l’on s’étonne à présent difficilement.
Alors, aujourd’hui, quelles innovations observe-t-on dans l’hôtellerie ? Quelles sont les nouvelles tendances ?
Comment distinguer les véritables innovations des phénomènes de mode ? Ce livret vous livre quelques-unes des pistes observées durant ces dernières années et qui contribuent, ou pourraient contribuer, à façonner l’hôtellerie d’aujourd’hui et de demain.
Numérique – Internet – Nouvelles Technologies
L’hôtellerie à l’heure du numérique
L’apparition d’Internet et des nouvelles technologies a fatalement considérablement modifié le tourisme, de manière générale, et en corollaire l’hôtellerie. C’est un constat fait depuis plusieurs années maintenant, mais qui évidemment perdure. Des modifications qui se sont observées tant sur le plan des outils technologiques que sur les comportements des voyageurs, les deux allant de pair.
D’une manière ou d’une autre, tout le monde est désormais
impacté par le numérique, et vit avec en permanence. Selon
nos études, 82 % des clients d’hôtels voyageant en France
ont aujourd’hui un smartphone, 50 % se déplacent avec un
ordinateur et 35 % avec une tablette. Des chiffres parlants qui
montrent bien qu’Internet et les outils numériques ont pris
une grande place dans notre société et par ricochet auprès
des voyageurs. Cela n’est pas nouveau mais ne cesse de
croître. Alors que la possession d’un smartphone par les
Français a grimpé de +17 points entre 2015 et 2018 (selon la
DGE) celle d’un téléphone fixe a, à l’inverse, régressé de -5
points.
Une évolution sociétale qui nécessite évidemment une adaptation de la part des hôteliers, à la fois parce que certains services innovants à l’époque ont fini par devenir des basiques pour les clients, mais aussi pour tirer profit de ces mutations en proposant des outils et éléments différenciant.
Le cas du Wifi est un bon exemple. Alors qu’il s’agissait d’un service additionnel, presque toujours payant à ses débuts dans les hôtels et parfois encore aujourd’hui, proposé par quelques hôteliers, il est aujourd’hui incontournable (et ce depuis quelques années). De plus, selon les clients, il doit désormais être d’accès gratuit et en haut à très haut débit, donc fluide à toute heure. Tout comme avoir un bon site web — vitrine valorisante de l’hôtel, où il doit être possible de réserver en ligne et en temps réel —, semble essentiel, surtout quand on sait que 80 % des clientèles hôtelières utilisent internet pour trouver un hôtel où séjourner — 93 % des clients de loisirs (selon notre
Étude sur les clientèles hôtelières de 2017). Pourtant, on constate qu’il est encore possible de trouver des sites d’hôtels à la charte graphique désuète, avec des informations sporadiques et sans la possibilité d’effectuer une réservation en directe. De quoi faire fuir le premier client potentiel venu et de l’envoyer direct aux OTAs.
Ces quelques exemples sont devenus des fondamentaux de l’exploitation hôtelière — dans les modes de recherche d’hébergements ou dans la consommation de l’hôtellerie — qui ne cessent de prendre de l’essor depuis cette dernière décennie, sous la pression des consommateurs eux-mêmes et du progrès technologique.
Les OTAs au cœur de l’hôtellerie en ligne
Parmi les grandes mutations du secteur touristique, et par extension du secteur hôtelier, installées depuis une bonne quinzaine d’années maintenant, on ne peut pas éluder les OTAs (Online Travel Agencies). Ce n’est certes pas un sujet nouveau. Booking et Expedia, les principaux opérateurs sur ce registre, existent depuis 1996. Mais, d’une part, étant extrêmement créatifs, ils ne cessent d’évoluer presque au jour le jour. D’autre part, ces plateformes de distribution hôtelière ont pris le pas et ont « ringardisé » tout ce qui existait auparavant comme solutions pour trouver des hôtels et pour réserver : centrales de réservations de chaînes ou indépendantes, agences de voyages « classiques », etc. Les plus connues des OTAs par le public sont, encore une fois, Booking, Hotels.com ou encore Expedia. Booking se démarque de ses concurrents avec 48 % de part de marché sur l’ensemble de la distribution en ligne en 2018, suivi par Expedia représentant 20 % de part de marché (source : Étude D-EDGE « Ce qui a changé
dans la distribution en ligne 2014-2018 »).
Une tendance qui se vérifie dans le cadre de nos études puisque parmi les clientèles hôtelières européennes interrogées, 66 % réservent toujours ou occasionnellement via les OTAs, dont 84 % utilisent Booking et 18 % Expedia. Et les raisons qui poussent les voyageurs internautes à utiliser ces OTAs sont nombreuses (voir graphique ci-dessous), parmi lesquelles un très large catalogue d’hébergements, des garanties pour les consommateurs, un côté rapide, rassurant et pratique, le sentiment (à tort ou à raison) que c’est moins cher ou encore le fait que ces plateformes se trouvent en tête des réponses aux requêtes faites sur Google.
Dans un contexte concurrentiel violent et face au zapping normalisé qui prend de l’ampleur parmi les clientèles touristiques, force est de reconnaître que les OTAs présentent de nombreux avantages également pour les hôteliers. Grâce à elles, la visibilité de l’hôtel peut être significativement améliorée, et ce à l’échelle mondiale, pouvant favoriser le développement du mix-clientèles et du taux d’occupation. D’autant plus que seulement 2 hôteliers indépendants sur 5 développent une commercialisation active pour leur établissement. Être présent sur ces plateformes permet également de simplifier la gestion des réservations pour l’hôtelier, celui-ci devant surtout s’assurer de la validité de ses tarifs et des disponibilités de ses chambres.
Les OTAs : une contrainte ou un avantage ?
Mais ces avantages, aussi intéressants soient-ils, sont entachés par des contraintes dont les hôteliers aimeraient
bien se passer, parmi lesquelles… Être présents sur ces OTAs implique le versement d’une commission sur les prix
TTC des chambres louées pouvant varier entre 15 % et 18 %, pour grimper jusqu’à 30 % pour être le mieux
référencé et donc dans les premières lignes de réponse aux requêtes des clients dans une destination.
Elles cherchent également à imposer une parité tarifaire aux hôtels — même si la Loi interdit à présent cette
pratique, qui reste cependant sous-jacente —, invitant les hôteliers à ne pas afficher sur leur propre site des prix de
chambres inférieurs à ceux qu’ils donnent à la plateforme (les hôtels n’ont donc plus totalement la main sur leur
politique tarifaire). Une parité que l’on retrouve aussi sur les disponibilités, l’hôtel devant les communiquer à toutes
les OTAs avec lesquelles il travaille, sans faire de préférence (notamment par rapport aux montants des
commissions).
Autre aspect, lorsque les clients réservent via une OTA, c’est elle qui récupère les données du client, et non l’hôtel.
Ce dernier est donc dépossédé de précieuses informations et se voit empêcher de solliciter le client pour de futurs
séjours. Sauf à le questionner au moment du séjour, ce qui reste délicat et pas forcément accepté par le client.
Recensant un très grand nombre d’hôtels, facilitant la
recherche d’hébergements, plaisant aux voyageurs et
surtout en étant extrêmement bien référencées sur
Internet, ces OTAs ont ainsi fait baisser les ventes
hôtelières en direct auprès des hôtels.
Alors qu’en 2009, 59 % des réservations vers les
hôtels français (par les clientèles françaises et
étrangères) se faisaient en direct, celles-ci ont chuté à
30 % en 2017. Une débâcle !
À l’inverse, les réservations via les OTAs qui n’étaient
que de 13 % en 2009 sont passées à 66 % en 2017
(selon les études réalisées par Coach Omnium,
interrogeant les voyageurs).
Un opérateur comme Booking dépense tous les
jours, dimanches compris, plus de 13 millions de
dollars pour sa promotion / commercialisation. Qui
dit mieux ?
L’émergence d’alternatives aux OTAs
Face à cette omniprésence des OTAs et marketplaces, encouragée aussi par l’évolution des modes de
consommation des internautes, les hôteliers indépendants ont perdu leur souveraineté digitale, première porte
d’entrée des clients (via les recherches d’hébergement et les réservations).
Pour mémoire, il faut savoir qu’en moyenne, 60 % à 70 % (selon les études) du trafic internet d’un hôtel passe par les
OTAs, et plus particulièrement par Booking, laissant les sites hôteliers partiellement désœuvrés alors que ces
derniers pourraient engendrer un plus grand nombre de réservations en direct. Cela a un coût.
Encore faut-il que cela soit possible, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas : sites mal référencés, « qui
ne donnent pas envie », absence de moteur de réservations, etc. A noter que selon nos études, 80 % des voyageurs
internautes qui recherchent un hébergement ne vont pas au-delà de la première page de réponses à leur requête
et 20 % s’arrêtent à la deuxième page. Autrement dit, un hôtel qui se trouve à la troisième page et suivantes, c’est
comme s’il n’existait pas sur le net.
Des solutions alternatives se sont donc développées pour aider les hôteliers à retrouver un peu de leur
indépendance face au poids de ces OTAs, notamment de Booking.
La startup niçoise 360&1, par exemple, propose des solutions de web analytique
et d’automatisation de la publicité online, notamment pour les hôteliers
indépendants, les accompagnant ainsi dans le contrôle de leur visibilité.
Créée en 2015, la plateforme de distribution Pilgo est directement
connectée aux systèmes de réservations des hôtels indépendants et de
certaines chaînes, permettant d’avoir une vision d’ensemble des tarifs
affichés des hôteliers en direct et de renvoyer sur leur site. L’entreprise a
récemment été reprise par Leboncoin.
Alors que les OTAs ont rapidement pris le pas sur les agences dites traditionnelles, elles se sont confrontées à
d’autres problématiques comme, par exemple, celle de ne pas forcément pouvoir apporter le même degré de
conseil qu’une agence de voyages ayant pignon sur rue (conseils sur mesure, gain de temps dans la recherche et
l’organisation pour le client, expertise d’un agent de voyages…).
Pour pallier cet écueil, mais aussi pour mieux guider et accompagner l’internaute, de nouvelles technologies se
déploient progressivement sur ces plateformes de réservations en ligne et plus généralement dans l’hôtellerie.
Les innovations au sein des OTAs
En 2018, Expedia Group a annoncé avoir investi 1,3 milliard d’euros en IA et en personnalisation des offres. Dès
2014, Expedia a mis en place des tests auprès d’usagers de son site internet. Les résultats sont analysés et
décortiqués par une équipe de chercheurs en économie et en psychologie comportementale afin de mieux
comprendre le fonctionnement du voyageur, d’« améliorer son expérience sur le site et lui donner envie de revenir »
(citation).
Parallèlement, l’opérateur a récemment créé une application mobile destinée à recueillir le feedback client, enrichie
d’un outil d’analyse de données. Sur le plan technologique, Expedia a lancé récemment une série de logiciels BtoB
destinés aux hôteliers dans le but d’augmenter le chiffre d’affaires : Expedia Powered Technology.
Booking n’est pas en reste puisque l’entreprise a mis en place plusieurs outils pour améliorer ses différents services.
• En 2016, la plateforme avait lancé l’outil Passion Search qui permettait aux internautes de choisir leurs
vacances en fonction de leurs passions. Néanmoins, cette offre ne semble plus disponible sur le site,
même s’il est toujours possible d’affiner sa recherche une fois la destination et les dates sélectionnées.
• BookingSuite, qui propose une série de solutions de Revenue Management.
• Booking Business, qui permet aux entreprises de gérer les voyages d’affaires de leurs collaborateurs.
• Booking Assistant, un chatbot intégré à la plateforme de réservation en ligne pour répondre
automatiquement aux questions fréquentes.
Ce dernier outil s’inscrit dans la tendance des chatbots (voir page suivante) que l’on a vu apparaître il y a quelques
années sur les sites d’e-commerce, puis dans l’hôtellerie.
Les chatbots comme moyen de communication instantanée
Parmi les innovations, non toutes récentes mais significatives et qui continuent de s’imposer, on peut parler des
chatbots, terme qui provient de la fusion entre « chat » (discussion en ligne) et « bot » (pour robot).
Il s’agit d’un « agent ou robot conversationnel » qui répond aux questions des utilisateurs du site internet (ou d’une
appli) sur lequel il est intégré. On distingue deux types de chatbots : ceux dits « scriptés » proposant plusieurs
choix de réponses à leur interlocuteur, et ceux plus évolués disposant d’une Intelligence Artificielle (IA), capable
d’apprendre et de s’adapter aux demandes spécifiques d’un utilisateur. Le premier permet d’obtenir des
informations par rapport à la plateforme à laquelle il est intégré, de manière assez basique, basé sur une série de
questions et de réponses possibles. Le second, plus complexe mais désormais de plus en plus utilisé, a la capacité
de comprendre les questions posées, d’interpréter l’intention de l’utilisateur et de fournir ainsi des réponses bien
plus personnalisées.
Visant à satisfaire les besoins immédiats des clients, ces chatbots semblent aujourd’hui de bonnes solutions à
intégrer sur un site d’e-commerce, à savoir une OTA, comme nous l’évoquions plus haut, mais aussi sur le site d’un
hôtel. Ils permettent à l’hôtelier de retenir l’internaute sur son site, en lui fournissant une information qu’il n’a pas pu
trouver (soit parce qu’elle n’est pas disponible, soit parce qu’il ne l’a pas vue), limitant ainsi les déperditions de
visiteurs en cas d’information écrite non disponible ; le but étant évidemment de mieux capter l’utilisateur et de
l’amener à réserver une prestation.
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C’est là une solution alternative pour
traiter des questions simples et
courantes, d’autant plus à n’importe
quelle heure du jour ou de la nuit.
Mais, les clients diront volontiers que
rien ne vaut un contact humain, si
des questions moins courantes sont
à poser et à la condition que cela ne
fasse pas perdre trop de temps (et
que le contact est sympathique et
compétent, bien sûr).
Intérêts et limites des chatbots
Intégrer un chatbot peut donc se montrer pertinent pour les hôteliers, mais uniquement si ces derniers ont déjà
mis en place une stratégie marketing et commerciale efficace. Et que le trafic est significativement important sur
leur site internet.
Comme nous le soulignions juste avant, le chatbot peut limiter la dispersion des internautes et favoriser ainsi
potentiellement les réservations en direct, encore faut-il que celles-ci soient réalisables sur le site et que ce dernier
soit attractif.
D’après notre dernière étude 2018 sur la commercialisation des hôteliers indépendants, près de 20 % d’entre eux
ne disposaient pas de moteur de réservation en ligne sur leur site (https://bit.ly/2meMehP).
Petit tour d’horizon des chatbots
Pour voir si cette tendance s’ancre solidement dans l’hôtellerie,
nous avons fait un petit tour d’horizon du secteur.
Comme nous l’évoquions plus haut, Booking a lancé en 2017
Booking Assistant, un chatbot que l’on trouve dans la partie « Service Clients – Centre d’aide », tout en bas du site. Une fois
sur la page, il est possible de consulter l’Assistant Booking,
mais pour cela il faut avoir effectué une réservation sur le site.
Cet assistant reste peu évident à trouver et présente
relativement peu d’intérêt : une fois l’indication du lieu et de la
date renseignée, on pourrait s’attendre à l’ouverture d’une
fenêtre pour guider l’internaute, lui proposer d’en savoir plus
sur la destination, le renseigner davantage sur les hôtels qu’il a
consultés, etc. L’intégration du chatbot une fois la réservation
effectuée semble un peu moins pertinente, selon nous.
Apparu en mai 2016, Phil Welcome est le chatbot du groupe
Accor. Celui
-ci n’est pas présent sur le site web, il a été pensé
comme un canal de communication spécifique dans
l’écosystème digital du groupe. Pour entrer en contact avec lui,
il faut le chercher sur Messenger afin de démarrer une
conversation. Il est également possible de le contacter via
Google Home en disant
« Ok Google, parler avec
AccorHotels
».
Néanmoins, le cheminement reste long et fastidieux car, d’une
part, il faut savoir qu’un chatbot Accor existe et, d’autre part, il
faut se rendre sur Facebook Messenger pour entrer en contact
avec lui (celui
-ci n’étant, a priori, pas disponible sur le site
d’Accor au moment d’une recherche ou d’une réservation
d’hôtel).
La plateforme TripAdvisor avait elle aussi lancée un chatbot il y
a quelques années, mais celui
-ci ne semble désormais plus
actif.
Pour répondre à cet engouement pour l’intégration d’un chatbot sur son site internet, plusieurs plateformes se sont
spécialisées dans le domaine.
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La société HDB – Hotel Direct Booster propose 2 types de produits : la « Guest Inbox », une plateforme de
messagerie instantanée qui s’intègre au moteur de réservation et un service avec des agents dédiés qui répondent
aux questions posées. Parmi les clients de la plateforme, l’hôtel du Collectionneur à Paris, l’ex-groupe Maranatha ou
encore la chaîne BritHotel.
Altelis, agence web pour les hôtels, ou encore Hotbot, robot de discussion instantanée, se sont également
positionnés sur le créneau des chatbots à destination des hôteliers.
Quicktext qui permet à l’hôtelier de
centraliser ses messageries (SMS,
Facebook, Messenger, WhatsApp,
Twitter…) via une plateforme unique en
se connectant au PMS de l’hôtel. Le
chatbot, nommé Zalia, est doté d’une
intelligence artificielle et communique en
8 langues. La plateforme met en avant un
gain de temps pour l’hôtelier, le fait de
ne plus passer à côté d’une vente en
renseignant au mieux le client et d’être
disponible 24H / 7J. Parmi les hôtels
travaillant avec la plateforme, on trouve,
entre autres, The Chess Hotel à Paris
dans le 9ème, Le Bristol Paris dans le 8ème,
Le Scribe Paris Opéra dans le 9ème,
Danubius Hotel Regents Park à Londres
ou encore le groupe Bourbon Hotels &
Resorts au Brésil.
Les assistants vocaux : l’interaction orale connectée
Les chatbots ne sont pas les seuls « robots » à coloniser le secteur hôtelier, les assistants vocaux sont aussi en train
de se faire une place. Il s’agit généralement d’une enceinte ou borne connectée (dans la chambre) à laquelle on
peut s’adresser pour demander des informations (la météo, le menu du restaurant de l’hôtel, une recette de
cuisine…) ou effectuer des tâches (mettre de la musique, fermer les volets, contrôler le chauffage…).
On trouve généralement ces programmes sur les smartphones (le plus connu étant sans doute Siri pour Apple).
Selon une étude CSA / Hadopi, en février 2019, un internaute français sur dix possédait au moins une enceinte
connectée, dont 83 % déclaraient la posséder depuis moins d’un an. Parmi les plus répandus, citons Google Home
et Alexa d’Amazon. Après avoir conquis les foyers, ces leaders s’attaquent à présent au secteur hôtelier.
Le groupe Amazon est loin d’être le seul à se lancer à la conquête de
l’hôtellerie, puisque d’autres opérateurs se positionnent sur ce marché.
C’est le cas de Quicktext, dont nous parlions plus haut avec les chatbots,
qui s’est associé à Alcatel-Lucent pour créer ensemble un assistant vocal
dédié au secteur hôtelier. Il permettra de gérer, là aussi, des équipements
connectés (éclairage, télévision, climatisation…), commander en roomservice, etc.
Amazon a d’ailleurs lancé Alexa for Hospitality pour conquérir le
marché hôtelier, dont le groupe Marriott International est l’un des
premiers à avoir implanté des assistants vocaux dans les chambres de
certains de ses hôtels (aux États-Unis) : Marriott Hotels, Westin Hotels
& Resorts, St. Regis Hotels & Resorts, Aloft Hotels et Autograph
Collection Hotels.
Si actuellement cet assistant vocal offre la possibilité de contrôler
verbalement la température de la chambre ou son éclairage, des
demandes basiques, ses possibilités de fonctionnalités sont bien plus
larges (régler un réveil, commander auprès du room service,
programmer la télévision, etc.).
La startup Vivoka, spécialisée dans la reconnaissance vocale pour les
professionnels, vise également le secteur hôtelier avec un assistant vocal
baptisé Voka.
Les assistants vocaux : vers une personnalisation max du service
Depuis 2017, Phil, le bot d’Accor est disponible sur
l’Assistant Google. Pour cela, il suffit de dire « Ok Google, je
veux parler avec AccorHotels » et la conversation commence,
permettant à l’utilisateur de se renseigner sur les
équipements disponibles et les informations pratiques de
l’hôtel choisi (parking, salle de réunions, etc.).
En 2018, l’hôtel Vulcano à Arona (Tenerife) fut le premier à
intégrer Google Home dans ses chambres via « Mr Spring »
qui fournit des informations générales sur l’hôtel, offre la
possibilité d’effectuer certaines réservations comme au spa,
de contrôler la domotique de la pièce, etc. Néanmoins,
l’assistant vocal Google ne semble pas avoir encore percé
dans l’hôtellerie ; peut-être faudra-t-il attendre encore un
peu pour cela.
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Avec l’implantation de ces assistants vocaux, les hôteliers peuvent y voir une simplification de l’utilisation de la
chambre par le client puisque ce dernier n’est plus obligé de descendre ou de téléphoner à la réception pour
demander une information.
Mais, c’est aussi un moyen de pousser la personnalisation — supposée — à son paroxysme pour s’adapter à la
plupart des besoins communs et envies du client. Un processus d’ultra-personnalisation que l’on voit se développer
dans les stratégies marketing et l’e-commerce ces dernières années.
Enfin, on ne peut pas passer à côté de Baidu, le leader sur le
marché chinois. Il possède plusieurs enceintes, dont DuerOS
qui s’aligne sur les modèles d’Amazon et Google.
En 2018, le groupe IHG a d’ailleurs équipé des Smart Rooms
dans certains de ses hôtels en Chine avec des enceintes
Baidu, permettant aux clients de personnaliser l’usage de
leur chambre : choix de la musique, contrôle des lumières ou
encore réglage de la température, etc.
Les assistants vocaux : quelle perception ?
Avec cette technologie qui commence à être connue et très présente, ne serait-ce qu’à travers
les smartphones, on peut se demander si cette ultra-personnalisation et le développement de
toutes ces solutions sont souhaités et bien acceptés par les clientèles hôtelières.
Si les assistants vocaux via des bornes ou enceintes semblent pratiques et divertissants,
surtout pour les clients qui n’en disposent pas chez eux, ils risquent d’être jugés intrusifs dans
le cadre d’un hôtel (les requêtes formulées pourraient être enregistrées et même, à priori, les
bruits dans la chambre via le micro actif) et faire l’objet de méfiance et de rejets.
La société Google a d’ailleurs admis avoir accès aux enregistrements de ses assistants vocaux,
le justifiant par la volonté d’améliorer l’intelligence artificielle de sa technologie. Elle prétend
que ce n’est pas le contenu qui l’intéresse, mais la formulation. Dans les conditions
d’utilisation de Google Home, il est d’ailleurs précisé que les demandes faites à l’assistant
vocal sont automatiquement enregistrées, mais il n’est pas indiqué qu’une écoute
permanente peut exister. Le groupe Amazon est lui aussi accusé d’écoute illicite via son
enceinte Alexa. L’opérateur a admis conserver les enregistrements vocaux indéfiniment ou
« jusqu’à ce que les utilisateurs requièrent leur suppression » (sic).
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On peut donc s’interroger sur la pertinence de ce type d’outil, en dehors des requêtes relatives au confort et à
l’environnement de la chambre qui peuvent être très larges ou par une plus-value liée aux renseignements relatifs à
l’hôtel, au quartier, aux activités et services, etc. Pour autant, ces assistants hôteliers pourraient être facilement remis
en cause et considérés comme non justifiés, de nombreuses informations étant déjà faciles d’accès via les
smartphones et tablettes, dont disposent l’essentiel des clients. Ces dernières sont parfois même plus pertinentes
(grâce aux sites d’avis en ligne, aux réseaux sociaux…).
Les assistants vocaux soulèvent d’autres questions : Les clients ont-ils envie de parler à un robot ? Sont-ils prêts à
payer plus cher pour une chambre équipée et connectée ? Leur intérêt pour cette technologie est-elle durable
(phénomène de lassitude) ? L’assistant comprend-t-il tous les accents et toutes les langues ? Les hôteliers sont-ils
prêts à investir dans cet outil qui pourrait être perçu comme un gadget en comparaison aux nombreux
investissements incontournables auxquels ils sont contraints (literie, remise à neuf des chambres, logiciel de
gestion…) ? Sans parler de la prise de conscience collective des risques d’intrusion dans la vie privée.
Il est trop tôt pour connaître la perception des clients et des hôteliers sur un outil encore précurseur dans
l’hôtellerie. Il faudrait attendre quelque temps — sous réserve que cette solution se développe, ce qui n’est pas
certain — pour que les retours soient suffisamment importants et représentatifs pour être sondés et exploitables.
Quand les robots s’intègrent au personnel hôtelier
Même si les chatbots et les assistants vocaux sont des robots, dotés d’une
intelligence artificielle, il s’agit d’une intégration à un site internet ou d’une
enceinte, à l’inverse des robots « réels » qui prennent une forme palpable et
visible dans l’hôtellerie.
Néanmoins, l’apparition de ces robots reste pour le moment principalement
cantonnée au Japon, à la Chine et aux États-Unis.
Au Japon, à Nagasaki, l’hôtel Henn-Na, ouvert à l’été 2015, est l’un des premiers hôtels à avoir un personnel
composé de plus de 200 robots (serveurs, bagagistes, réceptionnistes…). Certains robots sont des dinosaures, et
ce sont eux qui expliquent comment faire le check-in. Cocasse ! D’ailleurs, ce type de robot non humanoïde semble
être préféré par les clients qui trouvent cela plus distrayant, étant parfois mal à l’aise et inquiets avec un robot
ressemblant trop à un humain.
Une innovation qui n’aura pas duré puisque début 2019, l’hôtel a pris la décision de se séparer d’une partie de
« son personnel robotique », la cause étant des problèmes de productivité, avec des bugs et disfonctionnements
trop récurrents et trop coûteux, sources de mauvaise image auprès de la clientèle.
Au Henn Na Tokyo Ginza, hôtel du même groupe situé dans le quartier d’affaires de la capitale japonaise, on trouve
deux femmes humanoïdes à la réception, et une armoire high-tech dans les chambres qui défroisse les costumes.
En Chine, cette fois-ci, le groupe Alibaba, plus connu dans le secteur du ecommerce, a ouvert un hôtel pilote à Hangzhou, là aussi « géré » en grande partie
par des robots. Cet établissement de 290 chambres, le FlyZoo, regroupe de
nombreux services technologiques gérés par un système d’intelligence artificielle ; le
but étant de montrer comment la technologie peut aider à transformer l’hôtellerie
et la restauration telles qu’on les connaît et pratique aujourd’hui.
En amont, les voyageurs peuvent réserver leur séjour sur l’application mobile FlyZoo
(en revanche, il ne nous a pas été possible de trouver cette appli sur l’AppStore ou
sur Android, mais l’hôtel est réservable sur Hotels.com, Expedia et ebookers) en
choisissant plusieurs critères au préalable, notamment l’orientation de la chambre,
ses équipements, son décor, etc.
Aux États-Unis, l’hôtel Aloft Cupertino, qui propose une desserte rapide aux sociétés
de la Silicon Valley, accueille depuis quelques années, un maître d’hôtel-robot,
baptisé A.L.O. Il a pour mission d’apporter en chambre les produits / services
demandés par la clientèle. Chose innovante, il n’accepte que les tweets comme
pourboire afin d’évaluer sa mission. Un an après, un nouveau robot est venu rejoindre
le premier, pour compléter l’offre de services proposée aux clients : trouver un
restaurant, réserver une animation, etc.
Des robots que l’on ne trouve pas que dans l’hôtellerie, mais également sur des
bateaux de croisières avec Royal Caribbean qui a expérimenté Kuka Agilus pour
son Bionic Bar, un bartender robotisé, ou encore la mise en place de robots dans
l’aéroport de Tokyo Haneda (entretien, chargement des bagages, interaction avec
les clients…).
Sur place, les voyageurs peuvent s’enregistrer aux bornes mises à disposition, de manière autonome. L’ouverture de
la chambre se fait par reconnaissance faciale en approchant le visage du scanner biométrique. Une fois à l’intérieur,
les chambres sont toutes équipées d’un assistant vocal permettant, par exemple, de régler la température ambiante,
contrôler les lumières, ouvrir / fermer les rideaux, demander le mot de passe du Wifi, commander à boire ou à
manger, etc
Intérêts et limites des robots
Les robots, humanoïdes ou non, présentent PLUSIEURS AVANTAGES POUR LE SECTEUR, MAIS CES ROBOTS NE REMPLACENT PAS
L’HUMAIN.
Si ces technologies, innovantes et encore peu répandues, amusent (parfois) et intriguent les clientèles, elles
s’intègrent dans l’idée de vivre du nouveau, de l’étonnant.
Mais, elles vont aussi à l’encontre d’une autre aspiration des voyageurs qui gagne largement du terrain depuis ces
dernières années, celle de renouer avec l’humain, notamment pour les clientèles occidentales. On accepte les
bornes de check-in / check-out, parce que cela fait gagner du temps, mais là s’arrête l’acceptable. Pour l’instant.
Néanmoins, les exemples cités restent presque anecdotiques et se trouvent tous dans des destinations où la
technologie prévaut. Il ne semble pas que cette tendance soit amenée à se développer à grande échelle avant
longtemps ; on est là dans le registre de l’hôtellerie insolite, avec des approches atypiques et assez « gadget ». Et,
autant que nous avons pu l’observer, cette culture ne suscite pas encore l’intérêt des opérateurs agissant sur le
marché français.
Alors que l’on voit déjà quels peuvent être les freins de l’intégration d’un assistant vocal dans un hôtel, celle d’un
robot n’est-elle pas encore plus osée, et donc risquée ? Mais, l’idée est peut-être, juste pour les hôteliers ou
groupes s’y intéressant, de faire du buzz. Point final.
Réseaux sociaux et influenceurs
La tendance lifestyle
Diversité de concepts d’hébergement
L’hôtellerie durable
Programmes de fidélité
Conclusions
Les modes de consommation évoluent vite et, avec eux, le tourisme et l’hôtellerie qui connaît de nouvelles
dynamiques — surtout contraintes —, depuis l’écriture de notre dernier livret sur l’innovation en 2016.
Des solutions technologies inédites tentent de se frayer un chemin malgré une hôtellerie pas toujours adaptée ou
prête à les recevoir, et une clientèle parfois méfiante et surtout elle aussi sur-sollicitée.
De nouvelles façons de consommer l’hôtellerie se sont installées, plus ponctuelles, plus diurnes, et pour d’autres
motifs que celui d’y passer la nuit. Même si cela reste encore plutôt anecdotique.
Des modes d’hébergements alternatifs, parfois insolites, se développent pour s’adapter à différents contextes,
besoins, envies… La prise de conscience écologique s’immisce progressivement, même si la mise en pratique dans
les hôtels reste souvent modeste, peu coutumière, et que la route est encore longue dans ce registre. Ne serait-ce
que parce que la clientèle elle-même n’est pas objectivement demandeuse.
Néanmoins, les buts de ces innovations recensées restent les mêmes : améliorer la qualité de séjour du client et
satisfaire ses aspirations, faciliter la gestion et le fonctionnement de l’hôtel, se démarquer de la concurrence,
surprendre quelquefois, etc. Avec pour finalité : vendre, plus et mieux.
Et la question « est-ce que les innovations présentées dans ce livret (et bien d’autres) y parviendront-elles ? » reste
en suspend, avec en sous-questions : Les chatbots vont ils se généraliser sur les sites Internet des hôteliers ? Les
assistants vocaux feront ils partie intégrante du fonctionnement des hôtels ? Les robots ont-ils un avenir dans
l’hôtellerie française ? La tendance lifestyle va-t-elle perdurer et ne pas être un simple phénomène de mode ? Quels
nouveaux concepts hôteliers verront le jour ? Les hôteliers vont-ils être contraints (par la réglementation ou par leurs
clients) à intégrer massivement les notions du développement durable ?
Les interrogations sont multiples sur le devenir de l’hôtellerie et des transformations qu’elle et ses acteurs
rencontrent, et encore plus ces derniers temps où le secteur du tourisme a littéralement été mis en devoir de revoir
sa copie, dans le cadre de la pandémie mondiale du coronavirus.
L’innovation participera-t-elle à la relance de l’hôtellerie ? On peut le penser dans un secteur de service où le
contact humain est primordial, mais où la notion de plaisir, de confort et de bien-être reste attendue.
Il reste à s’interroger sur toutes ces innovations et sur le fait qu’elles ne sont pas souvent étudiées au préalable
auprès des clients, futurs utilisateurs, voire auprès des hôteliers eux-mêmes. Dans ce domaine de l’innovation, on
en est encore paradoxalement au marketing de l’offre — qui impose un produit / un service aux clients en espérant
qu’il va les satisfaire une fois lancé — plutôt qu’au marketing de la demande, qui part des besoins, souhaits et
envies des consommateurs. Deviner les aspirations des clients est évidemment moins efficace et plus risqué que
de savoir ce qu’ils peuvent vouloir ou aimer.