Bilan 2019 & Perspectives 2020 du marché français de l’investissement
Par Knight Frank
Nouveau record battu
Le marché français de l’investissement en immobilier d’entreprise a atteint de nouveaux sommets en 2019, prolongeant ainsi la phase de forte croissance entamée en 2014. « 35,4 milliards d’euros ont été investis en France en 2019, soit une hausse de 16 % sur un an et un nouveau record historique » annonce Vincent Bollaert, Directeur du département Investissement chez Knight Frank France. « Les sommes engagées dans l’Hexagone ont même augmenté de près de 50 % en cinq ans ! La progression est spectaculaire et témoigne du changement de dimension du marché français de l’investissement, dont la taille se rapproche ainsi peu à peu de celle du Royaume-Uni et de l’Allemagne, premiers marchés européens. Si la France bénéficie de nombreux atouts structurels, elle profite aussi d’une conjoncture particulièrement favorable. De fait, l’environnement de taux bas s’est installé de manière durable, incitant les investisseurs à accélérer le mouvement de diversification de leurs actifs et à accorder une plus large place à l’immobilier » explique Vincent Bollaert.
Le dynamisme des grands collecteurs d’épargne français est une bonne illustration de l’attrait du compartiment immobilier. Bénéficiant de niveaux de collecte record, les SCPI/OPCI ont concentré 24 % de l’ensemble des volumes investis en France en 2019 après 19 % en 2018. Grâce à ce rebond ainsi qu’aux grandes opérations réalisées par d’autres types d’acteurs domestiques (foncières, assureurs, etc.), la part des Français a très légèrement augmenté en 2019. Ils ont ainsi représenté 55 % des volumes investis dans l’Hexagone l’an passé, après 54 % en 2018. « Les performances exceptionnelles du marché français doivent aussi beaucoup à la hausse des montants engagés par les investisseurs étrangers. Ceux-ci ne cessent de progresser depuis 2017 et on atteint 15,8 milliards d’euros en 2019, soit une hausse de 14 % sur un an » indique Vincent Bollaert
Une année de méga deals, au bénéfice de l’Ile-de-France mais aussi des régions
La plus forte présence des investisseurs étrangers est allée de pair avec un accroissement du poids des grandes transactions. Ainsi, 84 opérations supérieures à 100 millions d’euros ont été signées en 2019 contre 77 en 2018. Elles comptent pour 65 % de l’ensemble des montants engagés dans l’Hexagone contre 61 % l’année précédente. Ce sont les méga deals qui ont fait la différence : les transactions supérieures à 400 millions d’euros de 2019 totalisent ainsi 10,1 milliards d’euros, contre 7,4 milliards en 2018. La plupart ont été réalisées en Ile-de-France comme, au 4e trimestre, la cession à SOGECAP de « Sways », futur siège de Canal + à Issy-les-Moulineaux ou la vente à GIC de « PB6 » à La Défense. « Rassemblant la majorité des grandes transactions, l’Île-de-France a conforté sa domination en 2019 : toutes opérations confondues, 26,6 milliards d’euros y ont été investis l’an passé, soit 75 % de l’activité en France et un montant encore jamais atteint » indique Vincent Bollaert.
Bureaux : l’Ouest et la 1ère Couronne prennent le relais du marché parisien
En 2018, les bureaux avaient amélioré de 13 % leur précédent record de 2007. La hausse a également été de 13 % en 2019 avec 25 milliards d’euros investis en bureaux en France, faisant de l’année écoulée la meilleure de l’histoire. Si les montants restent très largement concentrés en région parisienne (88 %), leur répartition y a sensiblement varié d’une année sur l’autre. Malgré un début d’année animé par deux cessions totalisant environ trois milliards d’euros (achat par SWISS LIFE du portefeuille TERREÏS et par SAMSUNG et PRIMONIAL REIM du « Lumière » dans le 12e), l’activité a nettement ralenti en 2019 dans Paris intra-muros avec une baisse de 13 % des sommes investies et 15 opérations supérieures à 100 millions d’euros contre 28 en 2018. Ce recul tient en partie au manque d’offres et à la volonté de nombreux propriétaires de conserver leurs actifs parisiens. De fait, malgré le niveau déjà élevé des valeurs vénales, la vigueur du marché locatif et le niveau historiquement bas des taux de vacance permettent d’envisager de nouvelles hausses, dans le QCA comme en dehors de ce dernier.
« D’autres pôles tertiaires ont pris le relais du marché parisien en 2019. C’est le cas de La Défense, où 3,6 milliards d’euros ont été investis en une douzaine d’opérations. La progression est de 45 % sur un an et permet au quartier d’affaires de réaliser sa deuxième meilleure performance après 2007 » selon Vincent Bollaert.
Logistique : une fin d’année en fanfare
Avec 5,1 milliards d’euros, les volumes investis en 2019 sur le marché des locaux industriels ont atteint un niveau inédit, dépassant de 44 % les montants engagés en 2018 et de 12 % le précédent record de 2017. Avec ce résultat, les locaux industriels captent 14 % de l’ensemble des sommes investies en France, encore loin derrière les bureaux (71 %) mais très proches des commerces (15 %). Cette belle performance tient essentiellement à l’emballement du marché de la logistique et aux cessions de portefeuilles d’entrepôts. Celles-ci se sont multipliées au fil des mois, avec huit transactions de plus de 100 millions d’euros recensées en 2019 dont sept au second semestre.
Commerces : pas de record, mais une bonne année tout de même
« Les commerces n’ont pas signé de nouveau record en 2019. Toutefois, avec 5,3 milliards d’euros investis en France, la hausse est de 12 % sur un an et de 18 % par rapport à la moyenne décennale. Ce résultat fait même de 2019 la troisième meilleure année de l’histoire et confirme que les commerces demeurent incontournables, même si la prudence des investisseurs reste de mise » annonce Antoine Grignon, Directeur du département Commerces chez Knight Frank France.
Comme pour les bureaux et les locaux industriels, 2019 aura été une année de grandes transactions. Les opérations supérieures à 100 millions d’euros ont en effet représenté 55 % des volumes investis en commerces en France l’an passé, contre 46 % en moyenne depuis dix ans. Plusieurs segments de marché en ont profité, comme les centres commerciaux (cession à AXA de 50 % et 75 % des parts de « Passage du Havre » et d’« Italie 2 »), ou la grande distribution à dominante alimentaire (acquisition par APOLLO GLOBAL MANAGEMENT et FORTRESS de deux portefeuilles CASINO). Néanmoins, ce sont les rues commerçantes qui ont été les principales bénéficiaires du « coup de boost » des grandes transactions, avec des volumes qui, toutes tailles confondues, se sont élevés à 2,8 milliards d’euros en 2019.
« L’année 2019 aura également été marquée par le retour au premier plan des centres commerciaux, avec 930 millions d’euros investis en 2019 contre 450 millions à peine en 2018. La hausse peut être relativisée, étant essentiellement liée à la cession des parts de deux actifs prime parisiens : « Passage du Havre » et « Italie 2 ». L’opération n’en est pas moins significative, actant le retour des grands institutionnels sur le marché des centres commerciaux alors que ces derniers sont souvent la cible du retail bashing » explique Antoine Grignon.
Qu’attendre de 2020 ?
Après une année 2019 exceptionnelle, les conditions restent en place pour prolonger l’élan observé depuis quelques années sur le marché de l’investissement, d’autant que plusieurs grandes ou très grandes opérations sont en cours de finalisation.
En France, l’activité économique devrait résister, contribuant à la bonne tenue des marchés locatifs, en Ile-de-France comme dans les grandes métropoles régionales. Surtout, les politiques monétaires restent pour l’instant accommodantes, notamment en Europe où la BCE n’a pas infléchi sa stratégie depuis l’arrivée de Christine Lagarde à la tête de l’institution. En 2020, le compartiment immobilier profitera donc comme ces dernières années de l’environnement de taux bas. « Couplé à la prudence des investisseurs, cela devrait continuer de jouer en faveur des actifs qui disposent de bons fondamentaux et assurent des revenus stables et sécurisés. La raréfaction de l’offre prime et la compression des taux de rendement favoriseront également les actifs de diversification. Enfin, certains investisseurs pourraient prendre davantage de risques, même s’ils resteront très sélectifs, ciblant les types de biens et secteurs géographiques les moins exposés à un changement de conjoncture. D’autres facteurs, plus structurels, sont également pris en compte en raison des bouleversements qu’ils peuvent potentiellement amener sur le long terme, à l’exemple des changements technologiques ou des préoccupations environnementales » conclut Vincent Bollaert.