Face à l’ampleur que prend la protestation des agriculteurs, la commission des affaires européennes s’est réunie ce matin et a entendu son président, Jean-François Rapin, rappeler les mises en garde répétées du Sénat sur l’impact redoutable pour les agriculteurs de la dernière réforme de la politique agricole commune (PAC) et de la stratégie européennes « De la ferme à la table ».
Ces mises en garde ont pris la forme de quatre résolutions européennes du Sénat au cours des sept dernières années pour demander un renforcement de la politique agricole commune :
la première, dès le 8 septembre 2017, appelait à sécuriser les revenus des agriculteurs et à appréhender avec pragmatisme et efficacité les questions environnementales.
Puis, dans ses résolutions du 6 juin 2018, du 7 mai 2019 et du 19 juin 2020, le Sénat n’a cessé de demander que la PAC bénéficie, a minima, d’un budget stable en euros constants pour la période 2021-2027 par rapport aux années 2014 – 2020 et soit toujours considérée comme une priorité stratégique.
En parallèle, a indiqué le Président Rapin, la commission des affaires européennes a travaillé, conjointement avec la commission des affaires économiques, à l’élaboration de quatre rapports d’information pour mettre en garde contre les effets prévisibles de la réforme de la PAC et plaider pour que les objectifs de cette politique priment sur ceux de la politique de concurrence.
Le Président Rapin a ensuite souligné que, dès la présentation de la stratégie « De la ferme à la table » en 2020, la commission des affaires européennes s’est alarmée de ses conséquences sur la production agricole européenne, réclamant à plusieurs reprises, et sans succès à ce jour, la publication par la Commission européenne d’une étude d’impact exhaustive. Des études de sources tierces soulignant un risque avéré de diminution de la production européenne de 10 % à 20 % d’ici 2030, le Sénat a adopté, le 6 mai 2022, dans un contexte marqué par la guerre en Ukraine, une résolution européenne pour appeler à reconsidérer sans délais les termes de la stratégie « De la ferme à la fourchette », afin de redonner priorité aux objectifs de production agricole, garantissant l’autonomie et l’indépendance alimentaire de l’Union européenne.
Fustigeant l’obstination de la Commission à élaborer de nouvelles réglementations à un rythme effréné, en dépit de tous les avertissements, Jean-François Rapin s’est par ailleurs insurgé contre les récentes déclarations du vice-président exécutif de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis, augurant d’une conclusion des négociations de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur avant la fin du mandat actuel. Soulignant que près de la moitié de l’empreinte carbone alimentaire française est liée aux importations de produits agricoles, selon le rapport dévoilé hier par le Haut conseil pour le climat, il a exhorté la Commission européenne à sortir du déni et à mettre fin à la concurrence déloyale dont sont victimes les agriculteurs.
Le Président Rapin a pointé l’urgence d’agir et pressé la Commission de prendre les mesures réclamées de longue date pour desserrer l’étau qui étouffe les agriculteurs : «Notre seul tort est d’avoir eu raison trop tôt et il est malheureux que nous n’ayons pas été entendus. Il aura fallu l’explosion actuelle pour que le diagnostic soit enfin posé et partagé. La Commission européenne doit prendre ses responsabilités et infléchir dès aujourd’hui sa politique agricole, sans attendre les conclusions du dialogue stratégique sur le futur de l’agriculture qu’elle lance seulement aujourd’hui ».
Jean-François Rapin (Les Républicains – Pas-de-Calais)