Par Angelo Caci, Managing Director chez SYRTALS CARDS & BEYOND
Grosse opération annoncée ce jour dans l’industrie des paiements, le rachat de Worldpay par un de ses concurrents, l’américain Global Payments, pour la bagatelle de 24,2 milliards us$.
Ces 2 acteurs sont des champions de l’acquisition (merchant acquiring en anglais) et la combinaison de leurs capacités permettra au nouvel ensemble de se hisser sur le podium mondial, au coude-à-coude avec JP Morgan Chase et Fiserv : 6 millions de commerçants dans 175 pays, 94 milliards de transactions pour une valeur de 3.700 milliards us$.
Dans la même opération, Global Payments cède son business Issuing (émanant essentiellement du rachat de T-SYS en 2019) pour 12,5 milliards us$ à FIS, un autre opérateur majeur étatsunien des paiements et services financiers qui détenait 45% de Worldpay aux côtés du fonds GTCR (55%).
Rappelons qu’en 2023, FIS avait cédé la majorité du capital de Worldpay à GTCR, après avoir la racheté la totalité en 2019 pour 41 milliards us$. Vous suivez? Que de rachats dans le métier des paiements, notamment de l’acquisition, nous direz-vous !
Au-delà du jeu de mots, c’est plutôt la norme dans cette industrie avec des dizaines d’opérations par an, certes pas toujours à coups de milliards, mais il y a déjà eu maintes transactions d’envergure par le passé. Les Fiserv, FIS, Worldline, Nexi, Nuvei, Corpay d’aujourd’hui, pour ne citer que ces noms, sont le résultat de fusions à répétition réalisées lors des dernières décennies des 2 côtés de l’Atlantique.
D’ailleurs, l’histoire seule de Worldpay est assez emblématique de cette effervescence continue. Fruit d’un partenariat avec NatWest au Royaume-Uni dans les années 1990, l’entreprise est ensuite pleinement intégrée dans le giron de RBS.
Après l’avoir fait grandir, notamment par croissance externe, la banque anglaise mal en point au sortir de la crise financière, est contrainte en 2010 de céder 80% des parts aux fonds Advent International et Bain Capital pour 2 milliards £. En 2015, ces deux heureux acquéreurs mettent Worldpay en bourse en empochant une plus-value de plusieurs milliards £.
Ce n’est point fini, en 2017, c’est un autre PSP américain Vantiv qui aligne 10 milliards us$ pour fusionner avec Worldpay, et le nouveau groupe empruntera son nom.
Si pour l’instant, la boucle est bouclée, à n’en pas douter, tout peut encore survenir, tant la course à la taille (raisonnée ou non, à vous d’en juger) est une des marottes des dirigeants ou bien une des obligations de cette industrie où les volumes comptent.
Pour autant, d’autres acteurs se tiennent encore à l’écart de ce mouvement M&A, faute de moyens conséquents ou par choix stratégique. C’est le cas d’Adyen qui affiche un parcours remarquable depuis ses débuts en 2006 avec 2 milliards € de revenus en 2024 (+24%), une rentabilité à faire pâlir ses concurrents et 44 milliards € de capitalisation boursière.
A suivre évidemment pour apprécier quelque tactique sera la plus payante…