Par Maryse Pogodzinski économiste – recherche économique de Groupama Asset Management
L’enquête de la BCE (*) sur les conditions de crédit dans la zone euro publiée aujourd’hui confirme que les conditions d’octroi de crédit ne sont plus globalement restrictives au 2ème trimestre 2024 (le solde net entre resserrement et assouplissement se stabilise à 0).
Cela se reflète dans des conditions encore très légèrement restrictives pour les entreprises (cf graphe1) et devenant de plus en plus accommodantes pour les ménages (notamment pour l’acquisition d’un logement).
En parallèle, la demande globale de crédit a augmenté, reflétant une amélioration significative du côté des ménages (crédits au logement) et une moindre diminution du côté des entreprises (cf graphe 2).
Cette amélioration globale confirme la fin de la phase de resserrement des 4 dernières années et renforce notre thèse que les conditions financières favoriseront la croissance en zone euro dans les prochains mois.
Dans les détails, l’enquête montre que le resserrement de l’offre de crédit pour les entreprises au 2èmetrimestre est de plus en plus modéré, et désormais inférieur à la moyenne historique. Les banques signalent « un très léger resserrement » de leurs conditions en France et en Allemagne, tandis que les banques italiennes ont signalé un assouplissement net de leurs conditions. La tolérance au risque des banques reste le principal moteur du « très léger resserrement » mais leur perception du risque, le coût des fonds, les contraintes de bilan, ainsi que la concurrence ont un impact globalement neutre.
Du côté des ménages, les banques font état d’un nouvel assouplissement des conditions de crédit, pour le 2ème trimestre consécutif. L’amélioration concerne les prêts pour l’achat de logements, tandis que les conditions pour les crédits à la consommation continuent de se resserrer. Il est intéressant de noter que l’amélioration est largement portée par les évolutions en France pour le 2ème trimestre consécutif ; les banques italiennes ont également fait état d’un assouplissement net de leurs conditions tandis que les conditions restent restrictives en Allemagne et en Espagne. La concurrence reste le principal facteur à l’origine de l’assouplissement des normes de crédit sur les prêts au logement.
Du côté de la demande, les banques signalent toujours une baisse de la demande nette des prêts pour les entreprises au 2ème trimestre bien que nettement moins qu’au trimestre précédent. Cela s’explique principalement par les taux d’intérêt encore élevés et la faiblesse des investissements fixes. On observe des divergences importantes entre les quatre plus grands pays de la zone euro, les banques françaises et italiennes faisant état d’une nouvelle baisse de la demande de prêts des entreprises et celles d’Allemagne et d’Espagne signalant au contraire une augmentation. La demande nette de crédits au logement et de crédit à la consommation a augmenté pour la 1ère fois depuis 2022. L’amélioration des perspectives du marché au logement a été le principal moteur de l’augmentation de la demande de prêts (et particulièrement en Allemagne). Le niveau général des taux d’intérêt et la confiance des consommateurs ont également eu un impact positif mais plus faible. A noter que la demande de prêts à la consommation a été affectée positivement par les dépenses en biens durables et la confiance des consommateurs
Au 3ème trimestre 2024, les banques s’attendent à un très léger resserrement des conditions de crédit pour les entreprises et des normes quasi inchangées pour les ménages ; tandis qu’une hausse de la demande globale serait à nouveau anticipée et inclurait pour la 1ère fois depuis 2 ans une augmentation de la demande nette des entreprises. Les anticipations des banques restent particulièrement favorables pour les ménages (conditions d’octroi et demande de prêts au logement notamment).
Globalement, les résultats de l’enquête de juillet renforcent notre scénario de reprise conjoncturelle en 2024. Ces résultats seront évidemment commentés par la BCE au prochain Conseil de politique monétaire (jeudi). Pour rappel, cette dernière devrait laisser ses taux directeurs inchangés après les avoir baissés de 25pdb en juin. Nous considérons toujours qu’il existe une « fenêtre de tir » pour une seconde baisse en septembre car les données d’inflation à ce stade sont conformes aux prévisions de la BCE et se rapprocheraient de la cible en septembre. Au-delà, la « fenêtre de tir » sera plus étroite car le rebond de l’inflation au-dessus de la cible remettra en cause une baisse au T4-2024.
(*) Enquête BCE menée entre le 10 et le 25 juin 2024 (157 banques interrogées, avec un taux de réponse à 100%)