par Philippe Crevel,
En octobre, selon l’INSEE, la production manufacturière est stable sur un mois dans l’industrie manufacturière (après -0,7 % en septembre). Pour l’ensemble de l’industrie, elle est en légère baisse (-0,1 % après -0,8 %).
En octobre 2024, la production manufacturière recule dans la fabrication de matériels de transport (-2,4 % après +1,9 %). Elle diminue dans l’industrie automobile (-2,9 % après +0,5 %) et la fabrication d’autres matériels de transport (-2,2 % après +2,8 %). La production baisse de nouveau dans les industries extractives, énergie, eau (-1,0 % après -1,3 %). Elle est en baisse dans les industries agro-alimentaires (-0,5 % après +0,7 %). À l’opposé, la production progresse dans la fabrication de biens d’équipement (+1,8 % après -0,4 %) et dans la cokéfaction et le raffinage (+4,8 % après +4,1 %).
La production cumulée des mois d’août à octobre 2024 est inférieure de 0,8 % à celle des trois mêmes mois de l’année précédente dans l’industrie manufacturière, et de 0,4 % dans l’ensemble de l’industrie. Sur cette période, la production recule dans la fabrication de matériels de transport (-5,0 %). Le secteur automobile est toujours à la peine avec une contraction de sa production de 10,7 %. La production baisse également dans la fabrication de biens d’équipement (-2,7 %) et la cokéfaction et le raffinage (5,3 %). À l’opposé, elle est en hausse dans les industries extractives, énergie, eau (+1,8 %) et les industries agro-alimentaires (+0,9 %).
Les branches exposées à la hausse du prix de l’énergie n’ont pas retrouvé leur niveau de production d’avant la guerre en Ukraine. La baisse de la production entre 2021 et 2024 pour la sidérurgie est de 23,5 %, de 19,6 % pour la fabrication de verre et articles en verre, de 17,2 % pour la fabrication de produits chimiques de base et de 11,8 % pour la fabrication de pâte à papier, papier et carton (-11,8 %).
Entre janvier 2018 et décembre 2020, le processus de délocalisation des entreprises françaises s’est atténué. L’année 2020, la dernière prise en compte dans le cadre de l’étude de l’INSEE publiée au début du mois de décembre de 2024, est évidemment à mettre à part compte tenu de l’épidémie de covid qui a contribué à geler de nombreux projets. Au-delà de cette année particulière, les entreprises françaises ont eu tendance à délocaliser des activités à forte valeur ajoutée et à relocaliser des activités à faible valeur ajoutée, contrairement à ce que certains auraient pu imaginer.
Parmi les sociétés de plus de 50 salariés, seules 2,8 % ont entrepris de redessiner les contours de leur chaîne de valeur mondiale. 1,7 % ont décidé de délocaliser et 12 % de relocaliser des activités. Ce sont essentiellement des entreprises multinationales du secteur manufacturier qui ont opéré des réorganisations dont la motivation première était la réduction des coûts et la recherche des compétences.
Les délocalisation d’activités routinières
Les opérations de délocalisation entre 2018 et 2020 ont concerné des activités intensives en travail qualifié Les tâches routinières et bien codifiées, comme la comptabilité, sont particulièrement propices à ces transferts. Plus une activité est routinière, plus sa probabilité de délocalisation augmente de 2,8 %.
Avec sa proximité culturelle et géographique, l’Europe reste une terre d’accueil privilégiée. Pourtant, pour certaines activités très spécifiques, comme celles liées à la recherche et développement, l’Inde s’impose comme un havre de compétitivité. En revanche, la Chine, autrefois symbole des délocalisations de masse, peine à séduire en raison des coûts logistiques et des défis de coordination. En outre, pour la délocalisation des activités intellectuelles, la barrière de la langue et les différences culturelles constituent des handicaps.
Relocalisations d’activités industrielles
Entre 2018 et 2020, des entreprises multinationales ont décidé de relocaliser certaines activités de production en lien avec la politique d’aides des pouvoirs publics. L’éclatement des chaînes de production est de plus en plus étudié en prenant en compte les coûts de transports et les aléas politiques. La crise Covid a accentué cette tendance. La question de la souveraineté économique est devenue plus prégnante.
La montée du protectionnisme pourrait avoir des effets contradictoires. Les entreprises multinationales seront amenées à produire au plus près de leur zone de commercialisation afin d’éviter les droits de douane. Elles continueront certainement à délocaliser les activités intellectuelles, de services dont les coûts dans les process de production sont élevés. Les usines de fabrication pourront faire l’objet de relocalisation au sein des pays dits avancés mais celles-ci seront fortement automatisées.