Par Octo AM Et dire que début mars, nous en étions presque à nous désoler d’une actualité trop pauvre pour animer nos hebdos crédit… Nous aurions dû simplement profiter de ces moments de calme et compter sur nos chères (chacun choisira la définition du mot ‘cher’ qui lui conviendra) amies les banques d’investissement pour animer, une fois de plus, l’actualité… Il y eu tout d’abord une alerte à bon compte sur Crédit Suisse, que la débâcle de SVB a probablement éludée pour certains investisseurs, mais que nous avions soulignée dans notre hebdo de la semaine passée. La SEC avait alors demandé des précisions sur des flux de trésorerie douteux et la banque Suisse avait jugé plus prudent de retarder la publication de ses comptes… Mais, pendant que SVB faisait la une des journaux, durant la semaine du 10 mars, les obligations Crédit suisse n’avaient pas tant chuté comme en témoigne le graphe ci-dessous. Nous exhortions donc nos lecteurs encore présents sur cet émetteur précaire et inconsistant depuis plusieurs années à céder leurs positions, au vu de ses déboires récurrents et toujours plus massifs. Evolution de la souche CS Senior 7¾ 2029 en prix |
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C’est finalement après avoir évacué le sujet SVB et passé un week end de repos et de réflexion, que le marché décida de s’attaquer résolument à la banque helvétique et lui asséna le coup de grâce, poussant son taux d’emprunt senior à plus de 10%, ses obligations les plus subordonnées à 30% du nominal et son CDS à plus de 1000 points, obligeant ainsi la Banque Nationale Suisse à apporter son soutien par un prêt de liquidités de 50 milliards de francs suisses pour éviter un bankrun et une probable faillite éclair. Nous ne reviendrons pas sur les raisons de notre défiance vis-à-vis de Crédit Suisse, que vous trouverez dans quelques hebdos passés, dont le dernier (ici), mais apporterons quelques nouvelles précisions au vu des évènements récents :
Ainsi, si le schéma de prêt de la BNS est plutôt habituel pour parer au plus pressé, et la FED a réagit à peu près de même la semaine passée pour SVB, ce qui l’est moins est la réaction de la FINMA, régulateur des banques suisses, qui a apporté son soutien moral au management de Crédit Suisse et a abandonné les potentielles investigations qu’elle avait envisagées sur les sorties de capitaux et la communication du management à ce sujet… Les plus moqueurs diront qu’on ne tire pas sur une ambulance… Les plus circonspects diront que la FINMA a joué ici son va-tout en mettant sa garantie sur la table et en affirmant que son analyse du bilan écarte tout danger… Mais n’oublions pas que la FINMA ne peut analyser que les chiffres qui lui sont fournis et que l’évaluation des prix des actifs, des engagements et des créances sont eux réalisés par la banque elle-même… qui n’a jusqu’à présent pas fait preuves d’une grande fiabilité… Selon nous, tout repose donc à ce stade sur l’Etat, la Banque Nationale Suisse et le système bancaire Suisse. S’il est clair que ces trois parties ont certainement un intérêt marqué pour organiser un sauvetage ordonné avec le moins de bruit, le moins de procès et le moins de conséquences négatives possibles pour leurs contreparties – ce qui plaide pour une absence de pertes pour les créanciers obligataires, y compris subordonnés – ceci reste un scenario de soutien public qui sort de l’analyse financière et réglementaire classique, et sur lequel nous avons eu trop peu de cas comparables, a fortiori en Suisse et sur des établissements aussi systémiques, depuis la mise en place des règles de Bâle post-2008, pour que nous nous y risquions. Ainsi, s’il peut être tentant pour un investisseur de se positionner sur des obligations parce qu’elles valent, en prix, 35% du nominal pour des subordonnées ou 70% pour des seniors, nous considérons qu’à moins d’être soi-même un investisseur Suisse impliqué dans la finance et le système bancaire local ou d’avoir une analyse de la politique économique et financière suisse, ce que nous ne sommes n’y n’avons, il est préférable de s’abstenir. De plus, nous considérons que Crédit Suisse est une entreprise systémique pour la finance européenne, voire mondiale. Au stade actuel, une étincelle serait tout à fait susceptible d’embraser le système bancaire européen, tant les imbrications sont nombreuses et de taille importante. Si nous continuons de penser que les banques européennes, pour la plupart, sont solides, bien capitalisées et capables de résister à la défaillance de l’une des plus fragiles d’entre elles depuis bien longtemps, nous considérons pour autant que les semaines à venir resteront très incertaines, causeront probablement de nouvelles phases d’inquiétudes, voire de sell-off sur le secteur, en particulier sur les dettes les plus subordonnées. Nous avons donc profité, ce mercredi, d’un marché plutôt calme et d’une quasi absence de contagion, pour céder à bon compte l’intégralité de nos positions en titres « cocos » et la quasi intégralité » de nos titres Tier 1, à la seule exception d’un certificat Rabobank émis essentiellement pour son réseau de clients depuis les années 2000 et ne contenant pas de clause d’absorption de pertes comme en ont les AT1 et cocos. Nous abordons donc cette phase de marché très incertaine avec une grande prudence qui se traduit dans les portefeuilles flexibles par une part de trésorerie significative et maintenant rémunérée au-delà de 3% à 4% – merci la BCE ! – et dans les fonds à échéance par un maintien d’un positionnement quasi exclusivement corporate et respectant scrupuleusement la maturité des fonds et une diversification la plus accrue possible. Et nous ne résistons pas à la tentation d’une remarque plus légère sur le sujet afin de tenter de faire sourire quelques secondes nos lecteurs dans cette semaine difficile. Remarquons ainsi que Crédit Suisse est encore à cet instant notée BBB par les agences de notation Moody’s et S&P, tandis que les investisseurs – et donc le marché – lui attribuent un rendement de 17%, soit supérieur à celui des émetteurs notés CCC, et qu’il a fallu que la BNS lui fournisse des liquidités pour éviter qu’elle ne s’effondre… De même Moody’s et S&P attribuaient respectivement à SVB, le 8 et 9 mars 2023, des note Baa1 et BBB- assorties d’une belle analyse, pour la dégrader à C et CC le 10 mars 2023, une fois la faillite actée… Du côté des agences de notation, comme chez les Poppys « non, non rien n’a changé » … Bien heureusement, l’empirisme et la régulation financière avaient déjà éloigné bon nombre d’investisseurs de ces établissements moins utiles pour anticiper et gérer son risque que pour résumer ce que le marché leur dit en un acronyme de AAA à D… Enfin, si nous devions dire un mot de la BCE, presque passée inaperçue derrière le Crédit Suisse, nous estimons que le respect de la parole donnée sur les 50 points de base de hausse était une nécessité pour rassurer les investisseurs sur :
Nous continuons donc, à ce sujet, sur nos convictions de début d’année en maintenant une maturité moyenne faible et un positionnement sur les obligations privées plutôt que sur les taux d’Etats, hautement volatiles et beaucoup moins rémunérateurs. A Propos d’Octo AM Créée en 2011 à l’initiative d’Octo Finances et adossée au groupe Amplegest depuis 2018, Octo AM est spécialiste de la gestion obligataire ‘value’. S’adressant essentiellement aux investisseurs professionnels, qu’ils soient institutionnels ou patrimoniaux, Octo AM décline sa gestion au travers de fonds ouverts, fonds dédiés ou mandats avec un objectif permanent : rechercher les obligations offrant, selon le gérant, un rendement supérieur à son risque de crédit sur un horizon donné. |