jeu. Déc 12th, 2024

En deux ans, l’intelligence artificielle (IA) est devenue un enjeu financier et économique mondial. Jamais une nouvelle technologie n’avait connu un tel essor en aussi peu de temps. Le cours des actions de Nvidia, qui produit les microprocesseurs destinés à l’IA, a été multiplié par quatre entre 2021 et 2024. L’augmentation de la valeur boursière des entreprises liées à cette technologie se chiffre en centaines de milliards de dollars. Pour autant, l’IA n’a eu pratiquement aucun effet sur la productivité et la croissance, redonnant corps au paradoxe de l’économiste Robert Solow : « On voit des ordinateurs partout, sauf dans les statistiques de productivité. » Le Prix Nobel avait prononcé cette formule en 1987, avant la révolution informatique de la fin du XXᵉ siècle, marquée par l’essor de l’ordinateur personnel. Pour l’IA, une évolution similaire est-elle envisageable ?

 

Les entreprises ont mis des décennies à adopter l’électricité. Le tracteur a été inventé au début du XX siècle, mais seulement 23 % des fermes américaines en possédaient un en 1940. En France, ce taux était inférieur à 2 %. En 2024, les exploitations agricoles françaises comptent chacune, en moyenne, 2,3 tracteurs. Internet s’est développé à partir de la fin des années 1990, mais ce n’est qu’en 2010 que deux tiers des entreprises américaines disposaient d’un site web. En France, cette proportion n’a été atteinte qu’en 2016. En 2024, 50 à 60 % des entreprises utiliseraient l’IA. Selon une étude de Bpifrance, entre 30 % et 40 % des entreprises françaises indiquent recourir à l’IA ou développer des solutions d’IA. Parmi les grandes entreprises françaises (plus de 1 000 employés), 26 % intègrent activement l’IA dans leurs activités. De plus, 45 % de ces entreprises explorent ou expérimentent actuellement l’IA, bien qu’elles n’aient pas encore déployé de modèles opérationnels. Cependant, seulement 2 % à 4 % des entreprises proposent des produits ou des services directement liés à l’IA.

 

La diffusion de ChatGPT ne s’accompagne pas d’une progression notable du PIB, contrairement à la fin des années 1990 avec la généralisation des ordinateurs individuels. La productivité est même en berne dans de nombreux pays comme la France ou l’Espagne. L’IA n’a pas provoqué la destruction de millions d’emplois, comme certains le craignaient. Le taux de chômage reste au sein de l’OCDE en-dessous de la barre des 5 % de la population active. Par ailleurs, les dépenses d’investissement dans les pays dits avancés demeurent assez faibles, ce qui suggère que les entreprises n’investissent pas massivement dans les outils numériques.

 

En cas de déception en termes de productivité ou de chiffre d’affaires pour l’IA, une correction boursière pourrait survenir, comme ce fut le cas au début des années 2000 avec l’éclatement de la bulle Internet. En revanche, si l’IA se révélait être une source significative de gains de productivité, elle pourrait connaître une diffusion exponentielle, donnant alors raison aux investisseurs qui ont plébiscité les valeurs technologiques ces derniers mois.

 

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