jeu. Déc 19th, 2024

Les 13 secteurs[1] suivis par Coface continueront à être impactés par les effets en chaîne de la guerre en Ukraine, directement ou indirectement, et à moyen et long terme, même si l’on constate des disparités en fonction du positionnement des entreprises dans la chaîne d’approvisionnement ou de leur localisation géographique. La plupart des secteurs devraient ainsi être affectés par le contexte de prix élevés des matières premières et de problèmes d’approvisionnement exacerbés par la guerre.

C’est notamment pour le pétrole dont la hausse des prix devrait continuer à être alimentée par l’interdiction du pétrole russe annoncée la semaine dernière par la Commission européenne[2], ainsi que les céréales (l’Ukraine, la Russie et le Belarus étant d’importants producteurs). Dans un contexte de perturbations continues des approvisionnements en semi-conducteurs, et avec les effets de ricochets lié à la poursuite de la pandémie – comme le montre le blocage du port de Shanghai – plus la guerre dure, plus il est probable qu’un choc de demande se matérialise, rendant l’environnement mondial encore plus défavorable.

Les secteurs les plus touchés devraient être ceux qui sont les plus cycliques et plus grands consommateurs d’énergies, tels que la pétrochimie[3], le transport, l’automobile, le papier, le textile-habillement et l’agroalimentaire. Coface estime que les secteurs les plus résilients seront les médias (un segment des TIC[4]), un segment des produits chimiques spécialisés et le secteur pharmaceutique.

Les tensions inflationnistes et le choc sur l’énergie affecteront principalement les secteurs cycliques et à forte intensité énergétique, avec des disparités importantes entre les régions Tous les secteurs industriels sont concernés, mais les plus cycliques et les plus gourmands en énergie, tels que la pétrochimie, le transport, le papier et le textile-habillement, seront parmi les plus touchés. Il s’agit de secteurs typiquement cycliques, qui sont mis au défi depuis plusieurs années par les innovations technologiques, les évolutions des réglementations environnementales et les évolutions des habitudes de consommation. Par exemple, le secteur du papier est confronté aux défis de la numérisation progressive de l’économie mondiale et de l’usage des réseaux sociaux. Les secteurs qui étaient en difficulté avant la crise sont également susceptibles d’être fortement impactés par ce nouveau choc. 

Les secteurs du textile-habillement et de l’automobile en sont une bonne illustration au niveau mondial. A long terme, il reste à déterminer dans quelle mesure le secteur de la distribution sera impacté. Ce contexte de guerre alimente des incertitudes qui devraient continuer à entraver la confiance des consommateurs. Toutefois, avec la matérialisation de certains amortisseurs mis en place par certains gouvernements, notamment dans les économies avancées, comme les bons alimentaires pour les populations les plus vulnérables ou les subventions des prix de l’énergie en Europe, l’impact sur le segment de la distribution pourrait être relativement modéré. Bien que le secteur des transports soit dans l’ensemble un secteur fortement consommateur d’énergie et qui devrait d’être touché par la hausse des prix du pétrole, Coface anticipe des disparités concernant l’impact du choc sur les différents sous-secteurs[5], car ils font face à ce nouveau choc avec des situations financières diverses. Par exemple, au 1er trimestre 2022, le fret maritime a réalisé un bénéfice représentant 28% de son chiffre d’affaires, tandis que le transport aérien a enregistré une perte de 11% de son chiffre d’affaires. En outre, pour une majorité de secteurs, Coface prévoit de grandes disparités en termes d’impact notamment en fonction du positionnement des industries et entreprises dans les chaînes d’approvisionnements (en amont ou en aval). Les dynamiques géographiques et opérationnelles au sein même des secteurs ainsi que leurs compositions joueront également un rôle.

Le secteur agroalimentaire devrait rester l’un des secteurs les plus touchés au niveau mondial, avec des implications en terme de risques sociopolitiques

Compte tenu de la dimension vitale du secteur agroalimentaire, les conséquences des défis auxquels il est confronté avec des prix élevés des denrées alimentaires et des intrants (en particulier les engrais) sont critiques, car elles pourraient menacer la sécurité alimentaire mondiale et déclencher une instabilité politique. Les prix élevés de l’énergie contribuent à augmenter les coûts des intrants pour les cultures agricoles, réduisant ainsi le rendement pour les agriculteurs, alors que le secteur est déjà vulnérable face à plusieurs facteurs structurels tels que les risques biologiques et l’évolution des conditions climatiques, matérialisés par exemple par de forts épisodes de chaleur depuis le début de l’année dans différentes parties du monde qui provoquent des sécheresses (Corne de l’Afrique, Inde, etc.) et des incendies à grande échelle (comme au Nouveau-Mexique aux États-Unis).

D’importantes transformations sectorielles et une évolution des habitudes de consommation sont attendues Sur le long terme, Coface prévoit une adaptation progressive des habitudes des consommateurs et des entreprises (économies d’énergie, abandon de la farine de blé au profit de produits alternatifs), ainsi qu’une modification de l’organisation des chaînes d’approvisionnements. Ce dernier point aura certainement un impact sur les chaînes mondiales. Par exemple, des voies de fret ferroviaire primordiales entre l’Europe et la Chine se développent désormais hors de Russie, via le corridor d’Asie centrale. À l’instar de l’impact de la crise Covid sur les tendances sectorielles mondiales, ce nouveau choc devrait servir de catalyseur à des transformations significatives.

Certains secteurs devraient rester résilients Les secteurs contracycliques et hautement innovants, qui nécessitent d’importantes activités de recherche et de développement, demeureront les plus résistants. Si la crise sanitaire liée au Covid s’est quelque peu atténuée dans de nombreuses régions du monde, elle n’est certainement pas terminée. Le secteur pharmaceutique devrait donc continuer à afficher une bonne dynamique financière. Parmi les différents segments des TIC, Coface s’attend à ce que celui des médias reste le plus résilient, car les investissements et équipements nécessaires à l’utilisation de ces services sont antérieurs à la crise, et les utilisateurs ne sont donc pas affectés par les perturbations de chaîne d’approvisionnement. De plus, l’utilisation de ces services reste indispensable et ils peuvent être consommé à distance.

Ils ne se trouvent donc pas limités par des barrières physiques et géographiques, contrairement aux activités de transport de marchandises, par exemple. Le sous-segment des produits chimiques de spécialité, en particulier les entreprises évoluant sur les marchés de la beauté, des parfums ou des arômes, devrait être résilient par rapport à d’autres industries du secteur, comme celles liées aux peintures et aux teintures, qui sont clientes d’un secteur automobile très cyclique et aux perspectives moroses. Ces trois industries (médias, chimie de spécialité et produits pharmaceutiques) ont en commun une combinaison de divers facteurs spécifiques, dont le fait qu’il s’agit de secteurs contra cycliques ou encore le fait que les produits et les positions dominantes sur le marché sont concentrés dans certaines parties du monde. En outre, il s’agit d’activités industrielles de haute technologie et innovantes, avec de fortes barrières à l’entrée.