mar. Déc 3rd, 2024

Balyo est une société française, créée en 2005, qui a développé un concept de module de  navigation, caractérisé par une technologie intelligente unique et innovante qui transforme  les chariots électriques standards en robots intelligents autonomes. 

Après avoir déployé plusieurs centaines de robots intelligents auprès d’acteurs majeurs de  la manutention et de la logistique, la société décide de s’introduire en bourse en 2017  (Euronext, Paris). 

L’introduction en bourse est un succès et permet à Balyo de lever près de 50 millions  d’euros à un prix de 4,11 euros par action auprès de petits porteurs et investisseurs  majoritairement français souhaitant soutenir une société française et prometteuse dans  un domaine de pointe. 

Malgré des marques d’intérêts de géants de la logistique, tel qu’Amazon, la Société ne  parvient à atteindre ses objectifs de croissance et le cours de l’action s’effondre.

Le 19 septembre 2023, une offre publique d’achat initiée par le fonds SVF II Strategic  Investments AIV LLC, affilié à Softbank, visant les titres au prix de 0,85 euro par action  ordinaire et est validée par l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). L’offre est restée  ouverte du 21 septembre au 25 octobre 2023. Le prix de 0,85 euro par action ordinaire  représente une prime de 57,4% par rapport au dernier cours de clôture avant l’annonce de  l’offre au 12 juin 2023. 

Générosité ou cupidité opportuniste ? 

Un simple calcul montre qu’au prix de 0,85 euros par action les 36 millions d’actions permettent d’acquérir une technologie prometteuse pour 30 millions d’euros quand la société est à sa côte boursière historique la plus basse. 

L’objectif pour le prédateur, Softbank, est de détenir plus de 90% de la Société pour  pouvoir effectuer une Offre publique de retrait. Une fois sortie du marché le potentiel de la  Société rémunérera le seul actionnaire restant au détriment des petits porteurs historiques. 

L’OPA réalisée par Softbank est un échec, certains petits porteurs ne voulant pas constater  leur perte et misant sur un redressement de la Société. Softbank ne détient alors que 71%  de la Société. 

Pourtant, l’annonce d’une Offre publique de retrait, gèle les transactions sur les actions qui  ne peuvent évoluer à la hausse dans un contexte où un actionnaire détient une majorité  absolue et a pour objectif de sortir la Société de la côte. 

Les comptes financiers de l’exercice 2023 sont publiés et se veulent rassurants. 

Softbank, actionnaire majoritaire prend les commandes et met en œuvre un plan de  bataille visant à prendre en otage les petits porteurs restants : 

Softbank fait voter un plan d’émission d’obligations convertibles de 2 millions d’euros  permettant une conversion en actions avec un discount de 10% par rapport au dernier  cours du marché. 

En mars 2024, Softbank consent à la Société un prêt de €13,2m portant intérêt au taux  de 10% annuel. La non-conversion de ce prêt en capital ayant des impacts sur la  trésorerie de la Société puisque les intérêts devront être payés. Et s’ils venaient à être  capitalisés, le taux annuel de 10% s’appliquera à la dette capitalisée ce qui sera très  couteux. 

Une Assemblée Générale Extraordinaire est convoquée le 13 juin 2024 avec pour ordre du jour une délégation donnée au Conseil d’Administration de procéder à une  augmentation de capital de 3.104.481 euros de valeur nominale. L’Assemblée Générale

mixte ayant auparavant fait voter que le nominal passait à 0,08 euros, cette délégation  apparente de 3.104.481 euros correspondant, en fait, à une délégation de 38 millions  d’actions nouvelles pour 36 millions d’actions existantes soit 50% de dilution et une  augmentation de capital de 18 millions d’euros au cours du marché à la date  d’émission, soit l’équivalent de la capitalisation boursière de Balyo. 

Cette même assemblée générale permet à l’actionnaire majoritaire de faire déléguer au  conseil d’administration la possibilité de souscrire à 20 millions d’euros de dettes  complémentaires. 

Dans le courant de l’été la société Balyo informe les actionnaires que les prises de  commandes attendues sont décalées et que de ce fait les 8,6 millions d’euros de  trésorerie disponibles fin 2023 ne permettront pas à la société de couvrir ses besoins  en 2024. Pour autant, la Société annonce que les perspectives de commandes sont à la  hausse mais trop tardivement… 

Au cours de l’été, une note d’information informe les actionnaires qu’une Assemblée  Générale Mixte va être convoquée en octobre 2024 pour voter une augmentation de  capital de 36 millions d’euros visant à convertir les 13 millions d’euros de dettes et les 2  millions d’euros d’obligations convertibles et à permettre aux actionnaires d’investir 20  millions d’euros complémentaires. 

Comble de l’opacité, le 3 octobre 2024, l’ordre du jour de l’Assemblée Générale  Ordinaire est mis à disposition et exprime dans un jargon juridique incompréhensible  pour un petit porteur qu’en complément des délégations votées le 13 juin 2024, il est  demandé aux actionnaires de déléguer au Conseil d’Administration une émission  complémentaire de 13 millions d’euros de nominal, ce qui correspond avec le  délégation du 13 juin 2024 à l’émission de 200 millions d’actions correspondant à 98  millions d’euros d’augmentation de capital pour une capitalisation boursière de 17  millions d’euros au cours du 17 octobre 2024. 

En comme si cela n’était pas suffisant, l’AG prévoit de déléguer au Conseil le recours à  la dette à concurrence de 100 millions d’euros complémentaires. 

La société à son plus bas niveau d’activité ayant consommé moins de 10 millions d’euros  de trésorerie 2024, comment justifier de ces 200 millions d’euros de délégation ? 

Les petits porteurs ont réclamé à la Société une explication sur la disproportion entre les  délégations soumises au vote (200 millions d’euros) et les besoins connus de la Société  dans le cours actuel de son activité (10 millions d’euros). 

Si ces besoins visent un investissement ambitieux pour financer un nouveau projet  d’entreprise, il eut été nécessaire que le plan d’affaires et les informations ayant présidées 

à la décision du Conseil d’administration, et donc de l’actionnaire majoritaire, soient  partagées avec les petits porteurs. 

Ce n’a pas été le cas. Et il convient de s’interroger sur la passivité de l’Autorité des Marchés  Financiers sur ces pratiques prédatrices et à l’aveuglement de nos dirigeants sur le pillage  de nos technologies. Ce qui nous rappelle la prise de contrôle par Softbank de la pépite  française de la robotique, Aldebaran en 2012. 

En mars 2012, après avoir investi pour détenir 80% de la société française Aldebaran  Robotics, SoftBank s’empare de la société high-tech française qui conçoit les robots Nao et investit 100 millions d’euros dans la Société après avoir remercié son fondateur et PDG,  Bruno Maisonnier, pour reprendre le contrôle. 

Aldebaran Robotics a conçu avec l’aide de SoftBank le robot Pepper, après avoir créé seule  Nao, une petite créature qui a séduit plusieurs centres de recherche et entreprises au  Japon et dans des dizaines d’autres pays. La firme française a aussi donné naissance à un  troisième robot appelé Romeo “destiné à approfondir les recherches sur l’assistance aux  personnes âgées ou en perte d’autonomie”. 

10 ans après, Softbank Group annonce le licenciement de la moitié des effectifs de sa  filiale française Softbank Robotics Europe, à l’origine des robots humanoïdes  programmables Pepper & NAO.  

Réveillons-nous et défendons nos innovateurs et les petits porteurs qui prennent le  risque de les financer.

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